Rappeler au criminel ses crimes, est-il un crime en soi ? Témoignage

TEMOIGNAGE (SIWEL) — Nul ne peut oublier la marée humaine kabyle déferlant sur Alger qui a apporté l’espoir du changement. Plus de deux millions de Kabyles ont marché sur Alger le 14 juin 2001 pour obliger le pouvoir algérien à satisfaire la plateforme de revendications née suite à l’assassinat de jeunes kabyles. Le Gouvernement provisoire kabyle en exil (Anavad) a décidé en 2013 de faire de cette date journée de la Nation kabyle.

18 ans après jour pour jour, le vendredi 14 juin 2019, comme chaque année, nous sommes descendus dans les rues pour rappeler ce que la mémoire collective garde comme crime contre la Kabylie. Cette année, la commémoration porte un autre nom. Celui de la répression massive. Fidèle à leurs pratiques infâmes et leurs méthodes héritées du colonialisme et l’impérialisme français, les CRS algériens ont encerclé l’université Hasnaoua, le noyau toujours vivace de la révolution de la cause identitaire kabyle.

Preuves à l’appui, plusieurs militants et militantes kabyles, même des mineurs ont été arrêtés pour que le silence soit maître des lieux et que la mémoire collective s’effrite devant la bassesse et le mépris de l’Etat colonial algérien qui s’acharne contre toute forme de liberté et tous les visages qui leur rappellent le changement.

De bon matin, des policiers algériens en civil ont été postés devant le portail de l’université pour étouffer dans l’œuf tout élan…

Comme d’habitude, un œil sur les militants et militantes kabyles, ils ont procédé à l’arrachement des drapeaux kabyles et humiliation des détenteurs de ce symbole.

Moi et mon camarade de combat, Djamel, nous avons essayé de rejoindre les autres sur la place où tous les autres militants se sont donné rendez-vous. Vu la présence des satellites du pouvoir et l’armada de chiens de garde qui servent les intérêts du pouvoir mafieux, nous avons décidé d’éviter cette place et de s’en éloigner pour ne pas être la chair à canon d’un escadron envoyé pour étouffer la liberté.

Même sort à Vgayet, nos confrères ont été intimidés par des brigadiers de gendarmerie qui ne faisaient qu’étaler davantage leur haine contre tout ce qui symbolise la Kabylie. Les questions restent sans réponses : pourquoi arrêter des militants pacifistes ? Ont-ils tort de revendiquer leur autonomie et indépendance ? Et les démocrates qui revendiquent la 2ème République, comment en espérez-vous quand la 1ère vous échappe ? Comment parler de la fraternité quand vous fermez les yeux devant la dictature froide qui s’abat contre les militants kabyles pacifiques ?

Les journalistes ont trouvé un autre cap pour orienter leur plume. Décidément, le silence devient nouveau roi dans le métier qui a vu des hommes et des femmes mourir pour que le peuple soit informé. Et les Djaout, Mekbel, Yefseh, ont-ils laissé une belle leçon de courage ou, comme ne cesse de nous le faire comprendre les illuminés, ont perdu vainement leurs vies ?

La Ligue des Droits de L’Homme a tourné le dos au drame qui sévit en Kabylie. C’est un sujet tabou.

Camarades,
Chaque jour, nos frères et sœurs sont arrêtés et agressés avant d’être libérés vers la fin de la soirée. Nul ne peut oublier notre Histoire lacérée par les mains sales d’un pouvoir mafieux qui a coulé le sang pour que ses intérêts soient gardés. Le printemps noir, le pourrissement de l’Algérie, la corruption en sont la preuve de l’état d’avancement de la pourriture. Que les générations futures s’en souviennent pour que nul ne puisse oublier. Car la liberté est un principe de vie. Pas une dette !

Comme à chaque fois, je dénonce avec mes mots hauts en couleur ce qui se passe avec nos frères et sœurs de combat, ceux qui se font maltraités par la police coloniale à la solde de la mafia politique. La résistance ne fait que briller les étoiles et fléchir la haine de l’ennemi. Un jour, nous embrassons notre indépendance et le soleil éclairera nos montagnes.
Comme disait Mammeri : « Nul ne peut arrêter un peuple sur le chemin de son destin ».

Vive la Kabylie libre et indépendante.

Netta ma Dnetta

SIWEL 191645 JUIN 19