MONTREAL (SIWEL) — Nous publions une critique rédigée par un fidèle contributeur de Siwel, Mack Ait-Aoudia, sur le livre « Noël en otage » de Ferhat Mehenni. Le contributeur livre son avis sur ce livre qui « se lit d’un coup », assure-t-il.

 

C’est un témoignage qui glace le sang. À travers les événements inattendus survenus durant les 48h qu’a duré la prise d’otages d’Airbus A300 de la compagnie Air France, la veille de Noël 1994. Ferhat At Sεid (Mehenni) nous a fait vivre un moment d’angoisse. Son moment. Son angoisse. Car il était parmi les 230 otages.

Se savoir entre les mains de quelqu’un d’autre est un sentiment d’échec qui réduit, du moins l’espace d’un moment, l’estime de soi au néant. C’est ce qu’on appelle casser un homme. C’est cet état de stress qui se manifeste dans les situations de perte de contrôle sur sa vie et ses mouvements que j’ai ressenti ou même vécu durant la lecture de ce témoignage. Ferhat, en sa qualité de Kabyle et d’otage de surcroît, a su communiquer les conséquences de ces deux situations sur celui qui les vit. Terrifiant.

Malgré l’angoisse de la mort et la peur de l’humiliation, Ferhat n’a pas perdu son sang-froid. Il a su négocier l’espoir qu’il s’inventait à la manière de celui qui voit sa fin arriver. On pense obligatoirement au roman “Le dernier jour d’un condamné” de Victor Hugo. Chaque minute compte. Chaque seconde est importante. On veut repousser le moment fatidique, car on veut s’accrocher à la vie. On veut vivre. Ce désir ardent que les spécialistes appellent l’instinct de survie.

Le plus dur dans ces moments est de rester digne. Ferhat a su rester digne quoique la situation ait été plus compliquée pour lui que pour les autres. Car, il est Kabyle et naturellement laïc. Il était instigateur du boycott scolaire de 1994 qui avait mis sa bouille à la Une des journaux des semaines durant. Il était également l’un des hauts dirigeants du RCD, un parti qui était résolument anti-islamiste. Dans l’absolu, Ferhat avait moins de chance de survivre que le Vietnamien ou le Français ayant été abattus. Il a survécu et c’est tant mieux pour lui et sa famille et également pour nous puisque son action politique aujourd’hui va dans le sens de la libération de notre peuple du joug arabo-islamiste. Il est et restera le premier président d’un gouvernement kabyle, aussi provisoire fut-il.

Ferhat a dépoussiéré des souvenirs douloureux dans ce bouquin. Il a également évoqué sincèrement son amitié (perdue) avec Said Sadi qui lui fait encore mal à mon avis. Il n’a pas encore bien digéré la séparation. C’est pourquoi on sent une prudence dans sa fracassante révélation et ses soupçons de complot ou plutôt de trahison de la part de son ami. Car il ne l’a pas accusé directement en y appuyant une charge d’arguments et de preuves. Cette révélation a été adoucie ou amoindrie par le fait de l’avoir livrée par bout. Elle n’en demeure pas moins grave à mes yeux. Car si Said Sadi a véritablement tenté ou plutôt comploté pour mettre la vie de son ami et compagnon de route en danger, il devrait répondre de ses actes. Si cette accusation s’avère vraie, Sadi devrait être dénoncé devant tous les Kabyles et remis à la place qui revient aux assassins et traîtres. Mais pour le moment, il a la présomption d’innocence et c’est à Ferhat que revient le fardeau de la preuve. Ce serait génial qu’il nous écrive un bouquin sur son parcours de lutte dans lequel il pourrait expliquer les détails de cette affaire.

Au-delà des révélations, Noël en otage est une ode à la vie. Un croche-pied aux terroristes islamistes et autres amateurs de la faucheuse de leur acabit. Il a été très bien écrit, sans prétention aucune et sur une trame chronologique fidèle à celle des évènements narrés. Il se lit d’un coup car, de toute façon, on a du mal à arrêter une fois qu’on a commencé. Il a été édité chez Michalon et disponible sur tadamsa.com.

Mack Ait-Aoudia

SIWEL
091902 AOU 16

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