TRIPOLI (SIWEL) — Hier, 23 juillet 2013, les amazighs de Libye devaient entamer la désobéissance civile annoncée par le Haut Conseil des Amazighs de Libye. Ce dernier avait déjà annoncé le retrait des membres qui les représentaient au sein du Congrès général national ainsi que le boycott des élections qui devaient élire une assemblée constituante en Libye. Mais face aux sérieuses menaces des amazighs, le Congrès général national libyen propose un nouvel amendement consacrant la langue amazighe comme « deuxième langue officielle » tout en « excluant son usage des milieux gouvernementaux, des correspondances officielles et des tribunaux ». Les amazighs rejettent le statut de « seconde » langue. Et pendant que la partie se joue « très serrée » en Libye, le vaste monde amazigh, échaudé par le drame des touaregs de l’Azawad, retient son souffle…

 

Libye: les Amazighs rejettent le statut de
Tout a commencé avec la loi électorale qui devait permettre l’élection d’une assemblée constituante sensée garantir la représentation des diverses composantes libyennes.

Mais, selon les amazighs de Libye, la loi électorale semble renfermer un certain nombre de points qui servent très subtilement à rendre impossible toute possibilité d’officialisation de la langue amazighe qui la doterait d’un statut équivalent à celui de l’arabe dans la future constitution libyenne et le Haut conseil des Amazigh , bien décidé à imposer la reconnaissance de l’identité amazighe en Libye, refuse de se faire spolier une nouvelle fois de l’identité première du pays.

En effet, l’Assemblée Constituante, prévoyant 60 membres, est sensée représenter les trois anciennes grandes provinces libyennes : la Cyrénaïque, le Fezzan et la Tripolitaine. Une fois élue, l’Assemblée Constituante est sensée rédiger la future constitution. Mais les règles mises en place par le Congrès général national, organe de transition libyenne, n’ont pas satisfait les amazighs qui lui reprochent de ne pas garantir l’équité et la justice entre toutes les composante libyennes.

Les femmes, en raison de la pression islamiste, passent d’une représentation de 17 (au sein du CGN) à 10% et les amazighs d’adrar inefusen, les touaregs et les toubous sont également dotés de 10%. Or, le résultat de cette loi électorale, une pure manigance arabo-islamiste, est que les amazighs, au final, se retrouvent avec une prévision de 6 sièges sur les 60 de l’assemblée constituante, une véritable insulte aux amazighs qui ne peuvent de ce fait, et en aucun cas, garantir la protection de leur identité face au visées négationnisme des courants arabo-islamistes.

La sous représentation des Amazighs est à juste titre,perçue comme une manœuvre destinée à tuer dans l’œuf toute existence officielle des amazighs. La sous représentation des femmes vise à les écarter et à les reléguer progressivement au statut de sous citoyennes, tel que l’entend la puissante la mouvance islamiste en Libye, comme partout ailleurs.

Mais les amazigh ne comptent pas se laisser faire. Le président du Haut Conseil des Amazighs de Libye, Nuri Esherwi, avait précisé de manière très claire les intentions des amazighs. Il a entre autre dit ceci : « si la langue Tamazight n’est pas officialisée, soyez sures alors que les Amazighs ne resteront pas silencieux face à une nouvelle ère de liberté factice et de démocratie de façade » ; « Les Amazighs, qui sont les premiers habitants de ce pays, ont le droit d’officialiser leur langue et ce n’est pas quelque chose d’impossible car ils ne sont pas de nouveaux arrivants en Libye et ils n’ont pas à demander que l’on vote pour l’existence ou non de leur langue »; « si notre langue n’est pas officialisée, soyez sure qu’il y’aura une nouvelle révolution ». « Vous avez peut-être étudié chaque action et prévue pour elles une réaction. Mais la réaction est toujours la plus violente que l’action, dit-on ». La menace est à peine voilée.

Libye: les Amazighs rejettent le statut de
Le 17 juillet dernier, le porte parole du haut conseil des amazigh, Shaban Busetta, avait rappelé que « les questions relatives aux minorités ne peuvent être exercées par la majorité ».

Le même jour, les révolutionnaires Amazighs d’Adrar n Infusen, d’At-Willul, de Zwara et les Touaregs avaient rendu public une déclaration commune par laquelle ils affirmaient leur « soutien au Haut conseil amazigh » et déclaraient, qu’ils « désignaient le haut conseil amazgh comme seul et unique représentant légitime des amazighs de Libye ». Ils déclaraient également, à l’unisson avec le Haut conseil amazigh, qu’ils « ne reconnaîtront aucune Constitution qui ne reconnaîtrait pas l’Amazighité » et qu’ils « ne reconnaîtront pas non plus les institution qui en découleront ». Dans cette déclaration, ils assuraient également qu’ils étaient « prêts à verser leur sang pour que leurs droits soient consacrés » et qu’ils se « battront derrière le Haut conseil amazigh jusqu’à l’aboutissement de leurs droits légitimes ».

Le bras de fer est engagé avec les autorités libyennes de transition et un certain nombre de « moyens » sont d’ores et déjà programmées en territoires amazighs :

• Fermeture des édifices étatiques,
• Fermeture des établissements de services publics,
• Fermeture des commerces,
• Fermeture des routes principales,
• Fermeture des ports,
• Fermeture des postes frontaliers terrestres,
• Fermeture des usines,
• Fermeture des champs pétroliers,
• Fermeture des écoles,
• Descente des drapeaux libyens,
• Boycott des élections,
• Non reconnaissance de l’assemblée constituante chargée de rédiger la nouvelle constitution libyenne.

En réponse à cette offensive amazighe, le Congrès général national libyen a fait mine de lâcher quelques « concessions » en modifiant et en rajoutant quelques articles de loi et règlements régissant l’élection de l’assemblée constituante et la rédaction de la future constitution.

Certains articles stipulent par exemple que « La langue Amazighe, les Touareg et les Toubous sont des éléments linguistiques et culturels de la société Libyenne »,que « Chacune des composantes linguistiques et culturelles a le droit d’étudier sa langue comme un élément facultatif dans le programme adopté en conformité avec les lois et les règlements en vigueur » ou encore que « Le ministère de la Culture et la société civile en coordination avec les conseils municipaux établissent des festivals annuels ou saisonniers pour faire revivre le patrimoine culturel des composantes linguistiques ».

Mais ces concessions ont été balayées par le Haut conseil amazigh qui a déclaré par la voix de son président Nuri Esherwi « refuser de discuter de l’offre qui n’est pas l’objet du litige ». En d’autre terme, les propositions sont considérées « hors sujet ».

Libye: les Amazighs rejettent le statut de
Suite à ce refus de discuter le simulacre d’offre de conciliation, le Congrès général national propose un nouvel amendement qui consiste à ajouter un nouvel article stipulant que « la langue tamazight sera la deuxième langue officielle » avec cependant une précision de taille stipulant que « Toutefois, cette langue ne sera pas utilisée dans les milieux gouvernementaux, ni dans la correspondance entre les autorités locales et l’autorité centrale, ni dans les litiges devant les tribunaux et les commissions d’arbitrage, ni dans les correspondances officielles ». Ce qui revient, de fait, à ce que la langue arabe demeure est la seule et unique langue officielle de l’État.

L’hostilité envers la reconnaissance des amazighs n’est désormais plus un secret pour personne en Libye. Théoriquement, les amazighs de Libye entraient hier en désobéissance civile. Pour l’instant, bien qu’elle ait été annoncé officiellement dans toutes les zons amazighes et aussi par par voie de presse, sa mise en œuvre effective, confirmée par le haut conseil amazigh, n’est pas encore étendue à tous les points cités de l’acte de désobéissance civile. La première action prévue dans l’immédiat serait de baisser tous les drapeaux libyens.

Au vu des relations tendues entre les amazighs et le Congrès général national libyen qui a fini, par ses basses manœuvres, à dévoiler au grand jour son hostilité aux amazighs, cet amendement qui n’est rien de plus q’une nouvelle manigance n’a pas été accepté dans les termes proposés. Dans toutes les villes des régions amazighes, des manifestation quotidiennes exigent l’officialisation de langue amazighe et la reconnaissance, sans ambiguïté, des fondements amazighs de la Libye.

Aux dernières nouvelles, le Haut conseil des amazighs, sans pour autant fermer la porte au dialogue avec les instances de transition libyennes, refuse le statut de "seconde langue officielle" et maintient son exigence d’un statut de "langue officielle" équivalent au statut de la langue arabe. Il attend par ailleurs que tous les moyens soient mis en oeuvre pour la rendre effectivement officielle dans toutes les institutions de l’Etat, même si techniquement cette officialisation prendra un certain temps du fait que la langue amazighe n’ait jamais bénéficié d’une quelconque prise ne charge en dehors de programmer son extinction.

Avec Le Matin.dz et Zuwara média
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SIWEL 240021 JUI 13

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