NOUAKCHOTT (SIWEL) — La nation mauritanienne regroupe des ethnies différentes (Arabo-berbères, Peulhs, Soninkés, Wolofs). Les Haratines ne font en aucun cas partie de la communauté des arabo-berbères, quoi que l’on partage les mêmes réalités culturelles. On s’identifie dans un même groupe, mais au fond il existe des velléités de supériorité des arabo-berbères sur leurs « supposés frères » Haratines.

 

Contribution/
Par : Cheibetta Ould Moctar Ould Abdy

Le point de vue qui sera développé dans ces quelques lignes ne manquera pas de heurter la sensibilité de certaines personnes. Mais en lisant mon argumentation avec l’intellect et non le cœur, on parviendra certainement à me comprendre. Je ne suis animé d’aucune rancœur. Je ne suis motivé par aucun agenda allant à l’encontre de l’unité de toutes les composantes de la Mauritanie. Il est juste vrai que pour vivre ensemble, il est nécessaire de régler les questions les plus essentielles s’il ne fallait pas dire existentielles. Ce texte s’adresse à intelligentsia mauritanienne.

Certainement qu’elle n’aura aucune difficulté à s’élever. Je ne m’attends pas à des jets de fleurs, j’ai très tôt compris que les fleurs fanaient. Je m’attends à une vive critique de la part d’hommes de bonne foi, mais surtout de gens d’une mauvaise foi à peine voilée. Ils sont les pires, car ils savent et décident souvent de façon volontaire à fermer les yeux parce que la situation les arrange. Mais je n’ai pas décidé de me prononcer pour plaire. S’il y a à plaire à quelqu’un, c’est bien d’Allah (Swt) qu’il s’agirait.

La communauté Haratine doit demander auprès l’Etat Mauritanien une reconnaissance de son ethnie en tant que composante différente de celle des Maures blancs. Bien que l’on partage une même culture/langue avec ces derniers, il est plus qu’évident que nous ne sommes pas de la même race. C’est justement cette question de la race qui est à l’origine des discriminations dans mon beau pays. Ce système de discrimination hérité de l’histoire, doit disparaître.

Mais pour qu’il disparaisse, encore faudrait-il bien identifier les problèmes et apporter des solutions efficaces. Le système officiel en Mauritanie fait des Haratines une composante du groupe arabe, à côté de celui des autres négro-africains non arabes. Loin de vouloir discuter de l’arabité des Haratines, tout le monde constate que les arabes blancs sont traités de façon différente à l’aune des arabes noirs.

La nation mauritanienne regroupe des ethnies différentes (Arabo-berbères, Peulhs, Soninkés, Wolofs). Les Haratines ne font en aucun cas partie de la communauté des arabo-berbères, quoi que l’on partage les mêmes réalités culturelles. On s’identifie dans un même groupe, mais au fond il existe des velléités de supériorité des arabo-berbères sur leurs « supposés frères » Haratines. Ce système moyenâgeux doit être relégué aux calendes grecques. Les deux communautés essaient de vivre ensemble, sans esprit de fraternité. Revendiquer la reconnaissance de sa hartanité, permettra à cette communauté de vivre de façon plus digne et plus libre.

Il n’y a rien de plus dangereux que l’esclavage mental. Justement, les pires ennemis des Haratines utilisent leur appartenance à la communauté arabe pour les maintenir dans l’état d’aliénation dans lequel ils se trouvent. C’est bien là un moyen de perpétuer leur domination. Le danger le plus prégnant concerne ces Haratines qui utilisent le politiquement correct pour bénéficier de privilèges. Ces gens doivent être combattus de façon virulente car ils ont une part énorme de responsabilité dans notre état de dénuement. La distinction est clairement établie entre les deux communautés.

Preuve en est que le vocabulaire ambiant dans la société mauritanienne a créé deux termes en guise de ligne de partage. Sans estime de soi, il ne peut y avoir de fierté de soi. L’absence de fierté de soi est la chose la plus dangereuse pour l’humain. Le combat pour l’identité est même plus féroce que celui qui a conduit à la disparition de certaines espèces.

Beaucoup de ceux qui récusaient le terme Hartani sont en train de le revendiquer. Ils ont bien fini par comprendre les énormes enjeux qu’il y avait derrière la dilution de toute cette communauté dans l’appellation arabe. Ce n’est pas dans notre intérêt d’accepter une telle chose. L’intérêt des arabo-berbères est de nous réunir pour former le peuple majoritaire de la Mauritanie soit disant « arabe ». Cela leur permettra, sous couvert d’une mascarade de démocratie, de continuer à octroyer les postes de responsabilité aux Maures blancs.

La communauté internationale sera ainsi amenée à croire que les choses fonctionnent normalement parce que ce seront les « arabes » majoritaires qui contrôleront l’essentiel des postes. Ceci est inadmissible. On ne peut pas comprendre qu’une minorité puisse présider aux destinées d’une majorité silencieuse. La démocratie c’est le gouvernement du plus grand nombre sur la base de règles justes et équitables. Il est inique que presque la quasi-totalité des postes soient entre les mains des seuls Maures blancs, exit les Maures noirs et autres négro-africains.

L’ethnie joue un rôle très important en Mauritanie, comme un élément essentiel du choix politique. Ce qui cause des problèmes imprévisibles dans une société. L’ethnie est une preuve tangible pour la manifestation de la liberté humaine. Sans la reconnaissance de l’ethnie haratine, on ne peut jamais affirmer notre liberté en Mauritanie. En tant qu’être humain, nous cherchons à avancer dans notre vie. L’acceptation de notre hartanité définira notre identité. Tout ce qui permet d’identifier une ethnie, on le trouve chez nous :

– Identité d’un peuple qui est lié à son ethnie : la mentalité
– Identité de l’individu

L’ethnie est une réponse pour une communauté, s’ils veulent leur existence. Le plus important doit être l’enracinement dans notre culture qui concrétise notre statut social et notre personnalité.

Chaque mauritanien pense que son ethnie ou sa tribu est meilleure. Ce qui complique notre unité nationale:

– L’ethnocentrisme : le fait de croire que son ethnie, sa langue et sa culture sont meilleures que celles des autres. Cette idée donne naissance au tribalisme
– Le tribalisme : grâce à mon tribut, mon ethnie est à la tête de toutes autres. C’est un grand problème en Mauritanie. Au sein de notre gouvernement, on parle de dosage tribal…

On doit pouvoir dépasser ces clivages à l’orée du 21ème siècle. Mais ce dépassement doit se faire sur des bases claires par la reconnaissance de l’identité de chacun et la disparition de toute tentative de maintenir un groupe dans un état d’asservissement. La situation au Soudan est bien là pour nous servir d’exemple sur les dangers de la dilution d’une communauté dans une autre à laquelle elle n’appartient pas au fond.

Sous nos yeux, le choix des administrateurs de l’Etat se fait dans un favoritisme évident pour les membres de son ethnie ou de sa tribu alors que la méritocratie devait primer. On agit comme si les Haratines sont des incapables, comme s’ils n’ont pas fait d’études dignes de ce nom. Les nominations se font sur la base d’une parenté commune. Le système arabo-berbère est de privilégier l’appartenance, au détriment de toute compétence et de l’efficacité dans l’action.

Le sentiment d’appartenance ethnique ou tribale continue même dans le choix d’un leader politique. Chaque citoyen pense qu’une personne de sa tribu est mieux placée pour gouverner. Pendant les élections en Mauritanie, le projet d’un candidat n’a pas importance; ce qui compte c’est l’ethnie et les tribus. D’où l’importance de la reconnaissance de notre ethnicité.

A travers ce texte, j’invite les Présidents des partis politiques et associations-Messoud ould Boulkheir, Mohamed Yahya Ould Ciré, Boubacar Ould Messoud, Samory Ould Beye, Bilal Ould Werzeg, Birama Ould Dah Ould Abeid et « Boidiel Ould Houmeid » à s’asseoir autour d’une table ronde et à discuter de la reconnaissance de l’ethnie haratine. Cette reconnaissance est la seule solution pour aider la génération future de notre communauté et de celle de la nation mauritanienne toute entière unie.


C.O.M.O.A

SIWEL 23 1200 AVR 13

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