TIRURDA (SIWEL) – Des artistes sculpteurs kabyles ont célébré le 20 avril à leur façon à travers des oeuvres dont le message puise ses racines dans notre histoire multi-millénaire. Par cette initiative, le village de Tirurda a voulu sortir de l’ordinaire célébration du Printemps Berbère en faisant leur devoir envers l’histoire Nord Africaine. Une action qui devra servir d’exemple aux autres villages de Kabylie.

 

De Vgayet en traversant la commune d’Aghbalou sur la Nationale 15, nous arrivons au Col de Tirourda, où la nature nous offre un spectacle des plus hallucinants. A l’Est, Azro N’Thor avec une altitude de 1883m, surplombant la région d’Iferhounene et de Michelet, et à l’Ouest, le point le plus culminant de la chaine montagneuse du Djurdjura (Lalla Khedidja) avec une altitude de 2308m. Laissant derrière nous la vallée de la Soummam et continuant la route, entre les 5km de descente qui séparent le col et le premier tunnel, nous entrevoyons un petit village sur la rive droite, Tirurda.

Un coin de paradis situé à 70km au Sud-Est du chef-lieu de Wilaya de Tizi-Ouzou, Commune et Daira d’Iferhounene, à la frontière de la Wilaya de Vgayet et Tuvirett, à une altitude de 1200m, endroit où la neige fait le bonheur et le malheur des habitants du village qui sont estimés à 2500 personnes. Dur et pénible pendant les quatre mois d’hiver, calme et paisible durant le reste de l’année. Tirurda (Thirourdha) en Kabyle signifie Avalanche. C’était le dernier bastion de la résistance en haute Kabylie durant l’occupation Française où il fut incendié le 9 Juillet 1859 et deux autres fois encore pendant la guerre de révolution 1954-1962. Elle fut considérée comme zone interdite par l’armée coloniale, où l’on risquait d’être fusillé sans sommation. Région montagneuse réputée pour sa richesse en pierre (rouge, bleue, blanche …) dont plusieurs habitants en ont fait un métier de génération en génération, ses mines de bronze et de charbon laissées à l’abandon, sans oublier ses moulins à eau, ses sources d’eau et cascades débordantes et une végétation à couper le souffle (Cerises, figues, glands, champignons, cèdre de l’Atlas, chêne noir, sapins …). Une richesse non seulement végétale mais aussi animale (singes Magot, chacals, renards, porc-épic, sangliers, hérissons, corbeaux, aigles et faucons, hiboux …). La plus grande richesse sont les enfants et les nouvelles générations dont ils ont fait leur priorité.

Tirurda figure parmi les villages qui ont su sauvegarder la gestion traditionnelle des villages Kabyles (Tajmaat – comité de village), où chaque famille est loin d’ignorer le règlement intérieur qui veille à installer une harmonie et une cohésion entre les villageois avec un sens de la communication qu’ils ont pu mettre en avant grâce à Tajmaat ; en collaboration avec les associations locales : Association Culturelle Tamazgha, Club Sportif Amateur, Association Féminine Tala Melloulen, Association Religieuse, Association des parents d’élèves et une Association pour leur communauté étrangère qui se trouve en France (Paris), sans oublier une Association Environnementale sur les rails. Les activités varient entre théâtre et musique, chorale et la promotion de la culture Amazigh, Tennis de table, karaté, jeux d’échecs, pétanque, billard, tournois de football et le fameux semi-marathon annuel d’Azro N’Thor. Entre couture et broderie, coiffure et tissage de tapis, l’initiation à la cuisine traditionnelle et sans oublier les cours d’alphabétisation donnés aux personnes âgées.

Au début des fontes des neiges de l’hiver 2015, les villageois ont entamés des travaux d’embellissement des placettes publiques et des espaces verts, la création d’espaces de loisirs pour les enfants et le réaménagement des terrains de jeux en l’occurrence le football et la pétanque. Voulant commémorer le 20 Avril 1980, Tajmaat (à sa tête Antar Ait Saai) et l’ensemble des associations du village ont voulu aménager leur place publique avec deux bustes de rois Numides réalisés et offerts par deux sculpteurs, le roi Yuva par Kamel Laoudj, et son fils le roi Yuva 2 par Hamoud Bouaicha. Dès les premières lueurs du matin, le soleil et le chant des oiseaux ont imposés leur présences, bien enracinés au milieu de cette chaine montagneuse ; la journée s’est déroulée dans une ambiance joyeuse où tout le monde a voulu mettre la main à la pate pour la collecte et la taille de la pierre qui a servie de socles aux deux bustes, l’assistance du public était très remarquée et qui variaient entre le petit Ghilas (3 ans) et le doyen du village Hadj Akli (106 ans). A la fin de l’après-midi, une fois les travaux terminés, la place publique (Tajmaat) s’est vue rajouter deux membres à la grande famille de Tirurda où les présents en ont profité pour prendre des photos et vidéos pour immortaliser l’événement.

Par cette initiative, le village de Tirurda a voulu sortir de l’ordinaire célébration du Printemps Berbère en faisant leur devoir envers l’histoire Nord Africaine. Une action qui devra servir d’exemple aux autres villages de Kabylie.

Par Kerrouche Yacine

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