TIZI-OUZOU (SIWEL) — Certes, la marche de Yennayer du conseil universitaire du MAK fut interdite et réprimée. Mais, c’est mal connaitre la détermination d’un peuple décidé à se libérer d’un colonialisme qui se cache derrière une souveraineté qu’il a sournoisement usurpé. L’Algérie n’est pas un Etat souverain. L’Algérie un Etat raciste et néocolonial. Il n’est que l’héritage empoisonné du colonialisme français qui poursuit son ‘’œuvre civilisatrice » et ne cesse de le prouver depuis 1962, en Kabylie, dans les Aurès, dans le Mzab ou en pays Touaregs. Désormais, plus personne n’est dupe de la nature réelle de cet Etat raciste, despotique et criminel, car comme disait Mouloud Mammeri « le temps n’est plus où une culture pouvait se tuer dans l’ombre, par la violence ouverte
et quelquefois avec l’acquiescement aliéné des victimes ».
En effet, comment peut-on qualifier un Etat qui apporte son appui logistique à des bandes organisées de voyous ou qui use d’armes de guerre contre une population civile désarmée? Un Etat criminel…
Comment qualifier un Etat qui assassine des centaines de citoyens parce qu’ils réclament leur droit d’exister dans leur langue, leur culture et leur identité sur leur propre territoire ? Un Etat raciste…
On a pu voir et entendre, dans une vidéo de la marche diffusée sur les réseaux sociaux, un policier hurler aux manifestants " ma âandkumch le droit ! " (Vous n’avez pas le droit: NDLR);
Mais, de quel droit s’agit-il donc ? Quel est ce droit qui dénie aux peuples de faire vivre dans la liberté et la dignité leur langue, leur culture et leur identité tout en leur imposant de force une autre langue, une autre culture et une autre identité ? Il n’y en a qu’un et c’est celui que s’octroi de force le colonialisme…
N’en déplaise au régime colonial d’Alger, la Kabylie prouve depuis 1963 qu’elle ne saurait se plier au dictat du racisme et du despotisme caricaturalement incarné par le pouvoir algérien. Elle ne saurait non plus s’accommoder de l’hypocrisie des faire-valoir démocratiques qui prétendent faire de l’opposition quand ils se cachent derrière des silences indignes, ou pis encore, quand ils cautionnent, par leur participation active au jeu pervers de la démocratie algérienne, l’ignominie d’un régime criminel qui dénie aux peuples amazighs le droit légitime d’exister, chez eux, souverainement avec leurs propres attributs identitaires.
Avec le MAK, il n’y a ni mairie, ni wilaya, ni ministère, ni aucun budget à gérer. On n’y récolte ni gloire ni fortune, juste des tracasseries administratives, des arrestations, des répressions mais, en revanche on y vit l’immense bonheur d’œuvrer pour une cause juste et légitime, celle du peuple kabyle qui lutte pour se préserver d’une mort programmée et, dans une solidarité sans faille, celle des autres peuples frères amazighs qui luttent pour arracher leur liberté et leur dignité.
Le Mouvement pour l’autodétermination de la Kabylie, qui avait dédiée la marche de Yennayer 2964 au peuple mozabite qui fait face au racisme féroce du régime criminel d’Alger, n’aura finalement pas marché face à la répression haineuse des forces de polices algérienne. Mais, faisant contre mauvaise fortune bon cœur, il aura tout de même réussit son pari en improvisant un sit-in où se sont succédé des prises de paroles franches et courageuses loin de "l’enfumage" politicien des "opposants" et autres "intellectuels" qui s’arrangent toujours pour éviter de fâcher le pouvoir au-delà des "limites autorisées".
Toujours est-il que, n’ayant pas reçu de sa hiérarchie l’autorisation de déverser leur haine contre les manifestants, le dispositif répressif algérien, trépignant de rage, a dû contenir ses pulsions haineuses, enviant certainement la liberté d’action accordée à leurs collègues de Ghardaia.
Le président du MAK, Bouaziz Ait Chebib, qui n’a cessé de faire "tampon" entre les manifestants et une horde de policiers "sur les dents" a confié à Siwel avoir tout fait pour freiner les manifestants qui ont tenté à plusieurs reprises de " forcer le barrage des brigades de la répression" ; avouant qu’il craignait particulièrement pour la sécurité des personnes âgées, des jeunes femmes et des enfants présents sur les lieux.
Dans son allocution, il a d’abord rappelé que ce " Yennayer 2964 est marquée du sceau indélébile de la fraternité amazighe".
L’indéfectible solidarité avec le peuple mozabite
"Non seulement nous avons dédié cette marche au peuple mozabite victime de l’apartheid du régime algérien, mais une forte délégation venue de la vallée du Mzab est avec nous ici, à Tizi-Ouzou pour exprimer ensemble notre solidarité avec tous les peuples amazighs qui luttent pour leur liberté et leur dignité ".
Il enchaine ensuite sur un bref rappel historique qui démontre le caractère raciste du régime algérien au lendemain même de sa naissance, y compris pour des œuvres d’expression arabe produite par un amazigh : "Depuis 1962, le peuple mozabite à l’image de tous les Amazighs d’Algérie, subit de plein fouet la politique d’arabisation et de dépersonnalisation de la part de l’Algérie Arabe qui s’est substituée à l’Algérie française.
Boumediene, juste après son accession au pouvoir, a émis le souhait de supprimer « l’hymne nationale algérienne » pour la simple raison qu’il était l’œuvre d’un mozabite, Moufdi Zakaria dont il faut rappeler qu’il est mort en exil en Tunisie" rappelle-t-il à l’assistance.
C’est à ce moment qu’un mozabite, émissaire du Dr. Kamel Eddine Fekhar a scandé : "Mzab autonome!", puis le président du MAK reprend la parole pour déclarer : "Après les Amazighs de Libye qui ont fini par émettre le vœu d’établir leur propre Etat, c’est au tour des Mozabite d’emboiter le pas au MAK. L’histoire et la dure réalité des amazighs nous donne raison. Ce qui est valable pour le peuple kabyle l’est aussi pour les autres peuples amazighs" ; "De par sa solidarité sans faille avec les peuples amazighs, le MAK a démontré que sa voie constitue le seul trait d’union, de solidarité et d’entraide entre les peuples Amazighs pour leur survie". C’est pour cela que le MAK appelle les peuples frères à la mise sur pied d’une organisation nord-africaine pour l’autodétermination des peuples amazighs".
À ce propos, le président du MAK a dit au cours de son allocution : " Nous menons un combat digne et civilisé face à un régime barbare et infâme. Le recours à la répression féroce par un régime oppresseur signifie que ses victime son près de triompher de sa barbarie. Et c’est notre cas en tant que peuple kabyle qui veut disposer de lui-même" avant de poursuivre "Quand en désespoir de cause, le pouvoir algérien n’a pas d’autres choix que de mentionner le MAK, il dit toujours que le MAK n’existe pas, que c’est du "tintamarre". Dans ce cas, pourquoi aujourd’hui, et à chaque fois que le MAK appelle à une marche, le pouvoir est dans l’obligation de déployer un dispositif répressif impressionnant ? Alors aujourd’hui, j’invente un nouveau mot en français : le « fantômage » et les services de sécurité algériens sont en réalité des services de lutte contre le fantômage ! " Ironise M. Ait Chebib.
Puis il avertit les ennemis de la Kabylie : "Le peuple kabyle a une bonne mémoire. Tôt ou tard, il vaincra ses ennemis et gare à celui qui entrave sa marche vers la liberté. Ceux et celles qui l’ont méprisé, agressés, assassiné, paieront cher leur haine ou leur trahison".
L’élection présidentielle
Concernant cet épisode qui suscite les passions des courtisants du régime criminel d’Alger, M. Ait-Chebib dit " La Kabylie n’est pas concernée par cette énième mascarade organisée par un pouvoir assassin. Comme les élections présidentielles précédentes, le peuple kabyle rejettera cette échéance. De même que Bouteflika n’a jamais été le président du peuple kabyle, son successeur ne le sera pas non plus. Le seul scrutin qui nous intéresse c’est le référendum d’autodétermination qui permettra au peuple kabyle de choisir librement le statut politique qui lui sied".
Abordant un autre énergumène qui amuse la galerie, le président du MAK dit : " Pour nous, Amar Ghoul est un individu totalement insignifiant. Il ne vaut même pas une virgule dans une phrase. Il ne mérite aucune réponse. Il ne figure sur aucune statistique sauf celles relative à la corruption où il est classé en tête de liste, comme le régime qu’il sert. Le pouvoir algérien, et ses satellites, incarne la corruption, la haine et l’ignorance la plus crasse. Alors, il ne peut pas se reconnaître dans un Yennayer qui symbolise la dignité, la liberté, la solidarité et le respect, et nous sommes à vrai dire soulagés qu’un individu de cet acabit s’en démarque totalement, c’est le contraire qui nous causerait du tort.
Puis le président du MAK conclue en disant " Encore une fois le MAK a démontré sa capacité de mobilisation qui le confirme comme première force politique d’opposition à ce régime criminel. Une force à laquelle sont suspendus les espoirs du peuple kabyle qui aspire à recouvrer sa liberté, sa dignité et sa souveraineté. Cette manifestation, bien que réprimés, augure par la formidable mobilisation citoyenne, un avenir de liberté et de prospérité pour la Kabylie"
La seconde a eu trait à des éclaircissements sur la manière dont ont été réprimés les manifestants mozabites. Les délégués du Mzab ont témoigné sur " les ignobles tortures subies par les citoyens mozabites dans les commissariats de police". Les témoignages de ces délégués ont révélé que " des policiers ont même perpétré des viols sur des manifestants à l’intérieur des commissariats. "
Dans un témoignage émouvant, ils ont rapportés que "Pratiquer des actes de sodomie sur un homme est la pire des tortures", disant que "En 2001, les gendarmes ont torturé de cette manière les jeunes gens en Kabylie. En 2013, ce sont les policiers qui l’ont fait à Ghardaia" .
En conclusion, il a été rappelé que " pendant Au cours de la guerre d’indépendance de l’Algérie, les militaires français – et encore pas tous – ont commis des abus sexuels sur des femmes. Dans l’Algérie de Bouteflika où l’idéologie arabo-islamiste est véhiculée par des appareils, le viol sexuel touche aussi les hommes. L’ultime question qui reste posée à présent est de savoir si le Général Abdelghani Hammel, l’homme qui a dirigé la prestigieuse Garde Républicaine, avait donné son aval pour cette forme de torture ? "
Hocine Azem, qui n’a cessé lui aussi de calmer les manifestants furieux d’êtres encerclés par des forces de polices qui entravaient leurs mouvements et leur manifestaient une hostilité flagrante. Voici l’essentiel de sa déclaration après avoir chaleureusement souhaité la bienvenue aux délégués mozabites:
« Depuis le pays des Kabyles qui a enfanté Lounès Matoub; Ferhat Mehenni; Fatma at Mansour Amrouche et Fatma n Soumer; nous exprimons la solidarité du peuple kabyle au peuple mozabite qui souffre le martyre avec la complicité agissante du régime arabo-islamiste amazighophobe d’Alger. Cet Etat voyou, de par sa nature aliénante et spoliatrice, sera toujours incapable de répondre aux aspirations politiques des peuples amazighs d’Algérie autrement que par la manipulation et la matraque. Cela est un point commun à tous les régimes tyranniques. Ces mauvais élèves qui n’ont pas compris que l’oppression et l’injustice n’ont jamais sauvé un Etat et l’Histoire en est témoin.
Aux Amazighs d’être à leur tour des acteurs agissants et ré-émerger dans l’Histoire. On invite donc nos frères mozabites à se constituer en projet politique à même de défendre leurs droits légitimes dans le cadre du droit universel à l’autodétermination des peuples. Les peuples amazighs doivent cesser de rêver : la dignité et la liberté ne sont pas à chercher à l’intérieur des systèmes qui les renient et les combattent. Nos méthodes et nos instruments de lutte doivent par conséquent être redéfinis en dehors des régimes arabo-islamistes au pouvoir en Afrique du Nord; des systèmes illégitimes condamnés à disparaître car ils vont à contre-courant de l’Histoire
»
Farid Djennadi, également membre de la direction du MAK à Vgayet a tenu à être présent en dépit d’un état encore fébrile qui l’avait cloué au lit durant depuis plusieurs jours. Il trouva la force nécessaire pour crier assez fort que " le combat du peuple kabyle pour son autodétermination est juste et légitime " et incitera non seulement les kabyles à poursuivre leur lutte pour s’affranchir du joug du régime arabo-islamique d’Alger, mais aussi les autres peuples amazighs à se soulever contre les dictatures qui les opprime, car il va de la survie des peuples amazighs et de la dignité de chacun d’entre nous "
Et enfin,Djafar Khennane, président du conseil régional de Tizi Ouzou, a appelé les Amazighs à conjuguer et à coordonner leurs efforts pour aller ensemble dans le sens de leurs libérations respectives en exigeant et en arrachant leur droit à l’autodétermination.
cdb/zp,
SIWEL 141451 JAN 14