AIT OUABANE (SIWEL) – Après trois années de gel forcé de ses cours universitaires d’été (2012, 2013 et 2014), la grande famille militante et patriotique du Mouvement pour l’Autodétermination de la Kabylie (MAK) a décidé cette année de reprendre sa tradition ; tradition d’ailleurs qui n’est pas la sienne propre puisque dans le monde entier, partis politiques, organisations et mouvements politiques choisissent cette période de l’année pour rassembler leurs troupes et leur inculquer notions et sujets de savoir jugés de leurs intérêts. Et pour cette année 2015, le choix est porté sur le village historique d’Aït-Ouabane, commune d’Akbil pour abriter l’université d’été du MAK de 4 jours dont le coup d’envoi a été donné, hier, par le premier responsable du MAK en personne. Notons d’emblée, que comme les précédents, ce rendez-vous 2015 sera marqué par une série de conférences données par des universitaires de renom autour naturellement d’une variation de thèmes.
La 6ème université d’été du MAK est dédié aux militants berberistes de 2949, Bacha Mustapha, la chanteuse Lila Amara et Katya Bengana.

 

Pour la journée d’hier donc, C’est Bouaziz Aït-Chebib qui a ouvert le bal avec une conférence autour du thème : « Le combat kabyle : histoire et évolution ». Nous devons signaler d’ores et déjà qu’en dépit de la douce fraîcheur vespérale constatée à l’air libre dans ce village situé au pied même de la montagne du Djurdjura, dans la salle, il y règne encore une chaleur à vous faire mouiller de sueur vos vêtements tellement elle (la salle) est bondée de monde. C’est dans cette atmosphère que le conférencier, dans un kabyle académique, appuyé de temps en temps par des phrases prononcées dans la langue de Voltaire, a rappelé les grandes vérités concernant la nation kabyle, « qui existe depuis l’aube de l’humanité » jusqu’à nos jours et le véritable rôle joué par le MAK ainsi que les raisons qui ont poussé des hommes et des femmes, jadis, militants pour « une Algérie algérienne » à reconsidérer la donne, à savoir que cette « Algérie » ne peut être « algérienne » puisqu’elle refuse catégoriquement la reconnaissance existentielle de ce pays appelé « la Kabylie » et de ce peuple « kabyle ».

Bouaziz Aït-Chebib a commencé par rappeler l’authenticité dimensionnelle du MAK lequel, en dépit de l’adversité, qui ne cesse, et souvent avec la complicité, hélas, de certaines forces idéologiques identifiées comme kabyles, de mener campagne mensongère contre lui en usant de tous les supports médiatiques dont elle dispose, a réussi à faire ancrer dans l’esprit du peuple kabyle, réprimé durant plus d’un siècle et demi, ce qu’il convient d’appeler « la kabylité ». Le concept de « kabylité » est à interpréter comme « pensée kabyle ». « C’est le MAK qui a fait renaître la kabylité dans l’esprit du citoyen kabyle », a, encore une fois, martelé le conférencier avant de s’attaquer au volet relevant purement des sciences historiques pour souligner l’existence de la nation kabyle depuis l’aube de l’humanité. C’est dans ce cas précis que le conférencier mettra tout d’abord l’accent sur la grande découverte de l’éminent archéologue, Slimane Hachi à savoir un très ancien squelette humain dans l’espace géographique de Kabylie. « La découverte de ce squelette en Kabylie constitue une preuve irréfutable que ce pays est habité depuis plusieurs millénaires par un groupement humain et qui n’est autre justement que le peuple kabyle », a explicité le Président du MAK. Toujours au volet scientifique, le conférencier citera les dessins rupestres du village de Tarihant, dans la commune de Boudjima et aârch des Ath-Ouaguenoun. Ces dessins, plusieurs fois millénaires, sont de nos jours encore très visibles et de loin à l’œil nu sur un grand rocher, sis au bas du village de Tarihant, au milieu de maquis et de vergers. Le lieudit est appelé « Azrou Imayazène » (le rocher des sages ou le rocher des Imusnawen). L’association scientifique et culturelle « Garoura » de Tarihant possède des données scientifiques fort intéressantes sur ces les gravures de ce rocher, lesquelles gravures renseignent sur l’existence de l’homme dans cette partie de la Kabylie depuis la nuit des temps.

Bouaziz Aït-Chebib citera également les écritures libyques découvertes et mises à jour en Kabylie par le chercheur et homme de lettres, Boulifa, comme preuve d’existence d’une civilisation ici en Kabylie ; laquelle civilisation n’est autre que kabyle. En suivant voie historique en aval, le conférencier arrive à l’époque du 18ème siècle, où les cartographies d’alors propres à l’actuelle Afrique du Nord ne mentionnaient aucunement « les noms Algérie, Tunisie et autres ». « Le nom retrouvé sur la carte géographique de l’époque et propre cet espace géographique en question mentionnait seulement « Berbérie » », a souligné encore le conférencier pour démontrer un peu plus loin que les dénominations que l’on connaît actuellement sont l’œuvre de la France coloniale. C’est le cas de l’appellation « Algérie » qui ne remonte qu’à l’année 1938 et dont la paternité de l’appellation revient au Général français, Schneider. L’assistance, qui écoute dans un silence religieux, écoutera plus loin encore de la bouche de Bouaziz Aït-Chebib que ce n’est qu’au cours de l’année 1857 que cette même France coloniale mettra fin à l’autonomie et l’indépendance de la Kabylie, pourtant de rigueur depuis les temps les plus reculés. Arrivant à la période contemporaine, le Président du MAK évoquera les différents idéologiques des différents acteurs du mouvement national, à savoir entre ceux prônant, à l’exemple de Hadj Messali, « l’Algérie, arabe et musulmane » et ceux, à l’image d’Imache Amar, prônant « l’Algérie algérienne ». Bouaziz Aït-Chebib, s’appuyant sur des volets historiques, prouvera que le rejet du principe existentiel de cette Kabylie par les partisans de la seule « Algérie » ne date pas d’aujourd’hui. Et, au même temps, il mettra en avant cette « ténacité » des Kabyles à résister pour leur reconnaissance en tant que tels. Le conférencier citera dans ce sens le cas Krim Belkacem, qui, par son intransigeance, fera imposer l’ensemble territorial de la Kabylie en un seul bloc, appelé « Wilaya 3 » pour déclencher la guerre d’indépendance.

Bouaziz Aït-Chebib imputera également la guerre du FFS en 1963 contre le nouveau pouvoir en place comme à cette « exigence de la reconnaissance de la nation kabyle ». La révolte de 1980 et la Grève du cartable sont aussi à inscrire dans cette tentative d’instaurer une « Algérie algérienne », a expliqué le conférencier qui n’a pas omis de signaler que la notion du « fédéralisme » a été aussi mise en avant et défendue par Ferhat M’henni en 1993. Bouaziz Aït-Chebib a rappelé à l’occasion de son intervention à Aït-Ouabane que l’ouverture sur le multipartisme en 1989, l’adhésion totale des Kabyles au Front des Forces Socialistes (FFS) et au Rassemblement pour la Culture et la Démocratie (RCD) n’a été en réalité que sa réaffirmation de son appartenance à la nation kabyle. « Et cette identification a été incarnée par Hocine Aït-Aït-Ahmed du côté du FFS et Ferhat M’henni du côté du RCD », a précisé le conférencier qui a ajouté à titre de précision : « L’admiration pour Hocine Aït-Ahmed et Ferhat M’henni a largement primé devant les projets de société présentés par leurs partis politiques respectifs ». « Au dehors de la Kabylie d’ailleurs, a noté encore le conférencier, on a eu la même vision, mais dans le sens inverse naturellement, à savoir aucune adhésion au FFS et au RCD, qui, même en présentant des projets de société modernes et ambitieux, sont jugés « mauvais », car ils sont kabyles ». « La tragédie du printemps 2001, poursuit le Président du MAK, a opéré sur Ferhat M’henni et tant d’autres camarades un véritable déclic quant une autre façon de considérer la situation et, par conséquent, de reconsidérer la question kabyle ». A ce stade d’avancement de la conférence, Bouaziz Aït-Chebib se lance alors dans l’explication des raisons de la création du MAK et à citer les acteurs et actrices impliquer dans cette nouvelle voie, et ce dans le respect de la chronologie des événements.

Le témoignage de Bouaziz Aït-Chebib sur ce volet précis sera accompagné de présentation de documents appuyant la véracité de ses propos. En effet, déclarations faites et signées par Ferhat M’henni au cours de cette période seront exhibées devant l’assistance. Dans ce même contexte, le conférencier mettra à nu les contradictions de certains militants et militantes de « la reconnaissance de l’identité et la culture amazighes ». La contradiction de ces militants et militants réside dans le fait qu’ils (elles) saisissent aujourd’hui la même occasion de s’attaquer aveuglément aux forces militantes et patriotiques du MAK. En s’appuyant sur des archives, le conférencier est allé jusqu’à citer certains noms de ceux et celles, malgré eux sans doute dans la plupart des cas, sont tombés dans le piège de la contradiction. Bouaziz Aït-Chebib a parlé d’une pétition signée par des hommes et des femmes en 1998, laquelle pétition devrait logiquement plaider aujourd’hui pour la légitimité du MAK. Le conférencier terminera son intervention laquelle intervention sera accueillie par d’interminables ovations, en déclarant que vu l’adhésion toujours exponentielle au MAK, l’autodétermination du peuple kabyle est à considérer qu’une simple question de temps.

Said Tissegouine

Laisser un commentaire