CHAMBERY (SIWEL)- Mourad Itim, responsable du MAK-Canada et acteur du mouvement associatif kabyle à Montréal a demandé à Madame Cécile Perret, université de Savoie, de lui expliquer l’utilité du sondage relatif à une étude sur l’identité et le développement territorial en Kabylie qu’elle vient d’initier.

Nous publions la réponse de Madame Cécile Perret à Mourad Itim mais tenons à préciser qu’une étude sérieuse sur la Kabylie devrait prendre en compte le caractère national de la Kabyle. Cette dernière était indépendante avant 1857.

 

Mourad Itim, responsable du MAK-Canada et acteur du mouvement associatif kabyle à Montréal a demandé à Madame Cécile Perret, université de Savoie, de lui expliquer l’utilité du sondage relatif à une étude sur l’identité et le développement territorial en Kabylie qu’elle vient d’initier.

Nous publions la réponse de Madame Cécile Perret mais tenons à préciser qu’une étude sérieuse sur la Kabylie devrait prendre en compte le caractère national de la Kabyle. Cette dernière était indépendante avant 1857. Il n’y avait pas de haute et de basse Kabylie, ces dénominations sont une pure création de l’administration coloniale françaises (ce phénomène de dénomination existe aussi en France, exemple, la Savoie et la Haute Savoie), prendre aussi en considération le soulèvement d’El Mokrani en 1871, cette guerre a réunis les quartes coins de la Kabylie.
Nous souhaitons que Madame Perret fasse attention au choix des mots choisis, tel que communauté car les kabyles sont un peuple et organisations informelles, fait-elle allusion aux organisations telles que (MAK GPK MCB Académie Berbère etc…) ?

Pour ce qui est de l’espace géographique de la Kabylie, il peut être délimité de plusieurs manière. Nous pouvons retourné aux cartes du génie militaire français qui montrent bien la délimitation de la Kabylie et ses Archs en 1834, ou plus récemment, nous pouvons considérer l’espace où sont implanté les deux partis politique kabyles, le FFS et le RCD, c’est pour dire a Madame Perret que le pays Kabyle existe (Tamurt n iqvayliwen, ou Bled Qbayel comme elle est reconnue par les arabophone du coin).
nous espérons que cette étude aille dans le sens du développement et de l’étique.

La réponse de Madame Cécile Perret à Mourad itim :

Bonjour, je répondrai à vos questions avec plaisir. Je vais tout d’abord me présenter.
Je suis enseignante à l’université de Savoie et je travaille sur l’Algérie et la Kabylie en particulier depuis une dizaine d’années. Je suis spécialisée dans le développement territorial et plus exactement l’impact du lien social sur le développement des territoires. De ce fait, la Kabylie est un terrain très riche. L’enquête que nous conduisons actuellement avec ma collègue Christiane Gagnon (Université du Québec à Chicoutimi (UQAC)) va dans le sens de mon dernier travail.

L’enquête en ligne correspond au sujet que nous souhaitons traiter avec Christiane Gagnon et dont je vous indique le contexte ci-dessous :
Le territoire est le résultat d’un processus de construction et de délimitation par les acteurs en interaction les uns avec les autres et en interaction avec un espace au sens géographique du terme. Il est le fruit d’une histoire et de traditions ancrées culturellement mais aussi de contraintes exogènes ou endogènes. Il est une réalité qui se cristallise dans différentes configurations et des modes de gouvernance particuliers ; il peut être porteur d’organisations informelles des acteurs, de structures sociales de type communautaire comme c’est le cas en Kabylie. Il est vécu dans le sens où il est déterminé par les pratiques et les représentations des communautés qui y vivent et qui s’en transmettent l’histoire et les mythes au fil des générations.

Le territoire fait système et génère son propre développement mais il ne correspond pas forcément à des frontières administratives. Enfin, il peut être à la fois envisagé comme support identitaire et comme producteur d’identité. Le développement territorial viable est un développement qui permet une transformation qui va dans le sens du « vivant » : respect de
– l’Homme et de son identité et respect de l’environnement naturel ou organisationnel.
– Le respect d’identités profondément enracinées, bien qu’également sujettes à évolutions, doit être pris en compte pour le maintien des équilibres (éviter des troubles sociaux, les guerres, etc.). C’est même certainement tout l’enjeu de notre siècle, à voir le nombre de conflits naissant autour de problèmes d’identité ou de peur de perte d’identité.
– L’identité est caractérisée « par une communauté de valeurs et de traits culturels, d’objectifs et d’enjeux sociaux, par celle d’une même langue [tamazight en Kabylie] et d’une même histoire, souvent, mais pas de manière obligatoire, par l’appropriation d’un territoire commun » (Di Méo, 2007 : 2). À noter que si les Kabyles parlent de Kabylie, il n’existe pas de frontières administratives d’un espace formellement déterminé appelé Kabylie.

Selon une étude de Mercure et al. réalisée en 1997, huit subcultures définies par un espace géographique, une langue, un mode de vie et des enracinements historiques singuliers peuvent être recensées en Algérie : Zone côtière, Hauts plateaux, Steppe, Sud, Monts de Kabylie, Monts des Aurès, Tlemcen, Maghnia-Sebdou et M’Zab.
L’analyse de la répartition des taux d’homogénéité culturelle montre que c’est l’aire culturelle des Monts de Kabylie qui est la plus homogène. Le choix de la Kabylie pour réaliser cette recherche nous est alors apparu évident, dans la mesure où la revendication identitaire y est toujours forte, que la culture kabyle (langue, Héros…) est toujours vivace, que des systèmes de gouvernance des villages issus de la tradition survivent malgré les aléas de l’Histoire (tajmaat ou comités de village) et que la société kabyle est caractérisée par des pratiques et valeurs spécifiques : l’lherma, le nif, tiwizi et tirugza qui concourent à la solidarité de la communauté.

Dans le projet de recherche en cours, nous nous proposons de répondre aux questions suivantes : Peut-on parler d’identité par le territoire en Kabylie ? Et quel est l’impact d’une éventuelle identification par le territoire sur le développement territorial viable ?
Pour illustrer notre propos, nous avons conçu un questionnaire diffusé en ligne. Plus nous aurons de réponses et plus notre travail sera solide statistiquement parlant.

En vous remerciant par avance
Cécile PERRET

cdb,
SIWEL 181512 FEV 15

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