Témoignage de Zahir : « ils m’ont violemment agressé quand je leur ai dit que je venais de la Kabylie »
GOUVERNEMENT PROVISOIRE KABYLE

MOUVEMENT POUR L’AUTODÉTERMINATION DE LA KABYLIE

MAK-ANAVAD

RAPPORT D’AGRESSION D’UN MILITANT PAR LA POLICE/GENDARMERIE COLONIALE

Zahir, dit Netta ma d netta, Militant de Bouzeguene

Je n’ai pas vécu les événements du printemps berbère 80. La chance dans un pays comme l’Algérie, si j’ose dire, c’est que l’histoire se répète et nous permet de vivre ce que l’âge nous a fait perdre. Pour preuve, cette année, nous vivons un printemps plus bariolé que celui de 1980. Ce 20 mai 2017, nous avons répondu à l’appel de l’Anavad, le Gouvernement Provisoire de la Kabylie, qui a pour objectif le soutien de nos frères de Tuvirett. Fidèle à ses pratiques basses, l’État algérien n’a pas trouvé mieux que d’envoyer ses chiens de garde de l’insécurité, réprimer la marche et empêcher des marcheurs pacifiques d’aller vers l’union et la rencontre.

J’ai été parmi les militants et les participants qui ont répondu à cet appel. Je suis arrivé sur les lieux (à Abrid n tmacint) à 9 h 00. Un de nos confrères m’a informé de l’arrestation de quelques militants et militantes. Cette sale besogne a été confiée à la B.R.I., la fameuse brigade de recherche et d’intervention. Le pouvoir colonial a déployé son génie pour réquisitionner un grand nombre des services de l’ordre dans le seul objectif de réprimer la marche et mettre une muselière au cri de liberté, arrêter les militants ou arracher le mot kabyle de la langue des opposants du système, de toute cette jeunesse kabyle qui refuse d’applaudir au mensonge et l’ignominie d’un système mafieux.

À 09 h 15, quatre à neuf policiers m’ont encerclé et arrêté comme un voleur de la Nation. Manquant d’intelligence pour justifier leur acte, je reçois deux coups de poing sur la mâchoire et un coup de pied qui a failli me briser le tibia. Par la suite, cette horde de voyous légalisée par un État de voleurs m’a conduit vers leur voiture blindée. Sur le chemin vers la voiture, l’un d’eux m’a questionné sur ma provenance : « Mnin jit ? » (D’où viens-tu ?). Mon sourire était presque un fouet. Eux qui ne reçoivent que des blâmes dans leur métier ! Un autre m’a reposé la question en kabyle : « Anisi i d-ruḥeḍ ? ». Je lui ai répondu : « cela serait préférable de me laisser respirer. »

Sur la place où sont garées leurs voitures, j’ai été accueilli par une horde d’une vingtaine de policiers armés de manchons, des matraques faites spécialement pour nous matraquer. Leurs postures ridicules dans leurs rôles de mauvais acteurs font plutôt rire que peur. Ils ne m’ont rien fait… À côté de la voiture, j’ai trouvé mon ami qui a été arrêté quelque temps avant moi.

Le larbin kabyle, le policier, est revenu à la charge :

– Win-isik ? (D’où viens-tu ?).

Cette fois, je décide de répondre à sa question stupide : N tmurt n Leqbayel (du pays kabyle)

– L’Algérie et la Kabylie sont les mêmes.

– Non, je suis uniquement de la Kabylie. Sa colère l’a amené à me claquer la tête avec violence contre le mur.

Au commissariat, je trouve mes camarades qui ont été arrêtés avant moi. Parmi eux, Frawsen et Koucila Ikken, une des victimes du printemps noir. La balle qu’il a reçue n’a pas cessé de vociférer sa colère contre ce régime assassin. Ce qui m’a choqué davantage, c’est ma rencontre avec l’écrivain Laarbi Yahioun, une des personnes qui porte la pensée kabyle sur les ailes de la liberté et donne de son temps, écrit en kabyle pour sauver ce qui en reste entre les griffes des temps modernes. Pour preuve, malgré l’interdiction de ses conférences et l’interdiction de la vente de ses livres, Laarbi Yahioun n’a jamais cessé de porter la beauté vers les hauteurs de la dignité.

Toutes ces arrestations sont illégales et relèvent de l’indignité. Ils ne nous arrêtent pas pour nous offrir à boire, certainement ! On me fait parler pour ne pas dire un interrogatoire. À la fin, ce policier kabyle s’est montré plus apaisé et se voulait compréhensif pour que je finisse par signer sa pseudo déclaration. Chose que j’ai refusée : « Vous m’avez arrêté, vous vous êtes comportés comme des sous-humains, vous nous avez traités indignement… et vous souhaitez que je signe ce chiffon alors que je suis contre vos agissements ? »

Ils m’ont photographié et pris mes empreintes digitales comme si mon arrestation relève d’un crime de lèse-majesté. Je ne suis qu’un jeune kabyle qui n’a pas voulu subir la honte de vos impasses politiques ! Finalement, en Algérie, le criminel est celui qui ne s’inscrit pas dans les rouages du pouvoir, la course vers la corruption.

Après avoir passé voir leur fameux médecin, après une pseudo consultation, j’ai passé au service concerné pour récupérer mon téléphone. Avant de le reprendre, ils ont pris le soin de mettre leur nez dedans. À ma question : « pourquoi vous regardez mes photos, alors qu’il y en a même celles de la famille ? » Le policier me répond en arabe, d’une agressivité sans retenue : « Tzid kelma, n-nehhi lek sserwel. » (Tu ajoutes un mot, je te déshabille). J’ai essayé de me défendre, mais l’autre a mis sa main sur mon cou. Je lui demande d’arrêter, il me répond sèchement : Tu fermes ta gueule sinon « neḍreb Rebbek ! ». Son collègue me colle contre le mur, me met les menottes et me pousse vers l’autre bureau. Vers 20 h, on décide de me libérer avec Rachida Ider, la Présidente de la Coordination Ouest du MAK-Anabad.

Je tiens à remercier toutes celles et tous ceux qui, de près ou de loin, nous ont soutenus et soutenus cet événement. Je remercie celles et ceux qui ont marché à Maillot et, aussi, les militants de Rafour qui nous ont pris en charge après notre libération des chiens enragés du système mafieux et corrompu algérien.

Vive la Kabylie libre et indépendante.

Zahir, dit Netta m ad Netta

SIWEL 212317 May 17 UTC

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