LE MINISTRE DE LA COLÈRE

KABYLIE (SIWEL) — Comme une douche froide, la dernière sortie du ministre algérien du commerce tendant  à proposer un projet  de  loi criminalisant la rédaction dans toute langue autre que l’arabe des enseignes et devantures de commerces et magasins (sic) est venue sonner le glas pour les kabyles hirakistes laudateurs du «  khawa-khawa » au détriment de «  tagmat ».

Cette loi (scélérate à plus d’un titre) ne vient pas pour contrer la langue française, loin de là. Il faut être vraiment naïf pour croire que c’est la langue de Molière qui dérange tant ce ministre. Si tel était le cas, ce projet de loi aurait du être formulé ainsi : criminaliser tout commerçant dont l’enseigne est écrite dans une autre langue que les langues nationales et officielles : l’arabe et le tamazight. L’on voit bien que la seule langue qui est écrasée, laminée voir indirectement interdite c’est cette langue amazighe pourtant institutionnalisée deuxième langue nationale et officielle du pays.

Du coup, ceux qui ont compris le manège de ce ministre n’ont pas tardé à exprimer leur colère. A commencer par Abedslam Abdenour qui sur les ondes de berbère télévision a lâché son courroux en disant tout simplement : «  cette fois-ci la Kabylie ne se laissera pas faire. Il est temps de proclamer la République kabyle ! »  Ailleurs sur les réseaux sociaux, les appels se multiplient pour contrer ce projet de loi. Pour bon nombre de kabyles la réponse idoine à cette loi raciste est tout simplement de  kabyliser toutes les enseignes des commerces sur le territoire kabyle.

Au delà de la colère que ce projet de loi suscite, et des réactions spontanées qu’elle engendre, il est bon de faire une analyse lucide du déroulement des événements.  En politique rien n’est gratuit, rien n’est du au hasard. Les provocations à l’encontre des kabyles et de la Kabylie s’enchainent à un rythme soutenu notamment depuis  le deuxième mois du Hirak.  En su du blocage des investissements en Kabylie, Interdiction du drapeau berbère, opération « zéro Kabyle », emprisonnement des militants du MAK, noyautage de la JSK vient s’ajouter maintenant cette  arabisation exclusive et obligatoire des enseignes commerciales !

 Il est clair que par toutes ces manœuvres diaboliques, le pouvoir veut embraser à tout prix la Kabylie.  Pris de panique devant le retour du « hirak», le pouvoir cherche à le diviser par diverses perfidies  et le bouc émissaire est vite trouvé : comme toujours c’est cette Kabylie (qui aspire à son indépendance).

La propagande du régime algérienn faisant passer la Kabylie comme « l’ennemi intérieur » et le Maroc comme ennemi extérieur, est encore une fois brandie comme autant de menaces pour la stabilité du pays (entendre du régime et du système prédateur)  et partant  créer ainsi  un climat de peur au sein des peuples d’Algérie dans l’espoir de voir ces derniers s’unir derrière leur gouvernement contre ces « ennemis » pour contrecarrer leurs menaces.

Telle est la raison qui pousse ce régime à chercher régulièrement à embraser la  Kabylie afin de se maintenir coûte que coûte au pouvoir. Pour sauver sa peau,  ce régime cynique et sans état d’âme  peut rééditer le coup du printemps noir. Il ne reculera devant rien  pour garantir sa survie. C’est pour cette raison que la Kabylie doit  faire preuve de mobilisation, de pragmatisme et d’union pour déjouer toutes ces manœuvres machiavéliques qui la menacent dans son identité et son existence même.

L’élite kabyle est d’ores et déjà interpellée sur le sujet. On attend leurs réactions fermes et décisives. Pas uniquement la réaction du MAK ou de l’Anavad qui tirent régulièrement la sonnete d’alarme, mais aussi celle du FFS, du RCD des personnalités comme Djamel Zenati,  Said Khelil, Mouloud Lounaouci, Moqrane Ait Larbi, Arezki Ait Larbi, Hend Sadi,  les détenus d’Avril 80, les associations culturelles, nos artistes (écrivains, chanteurs, poètes…).

Etant menacés dans notre existence même, l’heure n’est plus à la vigilance, mais à la mobilisation tout azimut, à l’union au discernement au pragmatisme. Sortir de cette utopie que veut nous faire croire que  la Kabylie peut imposer à elle seule  la démocratie, la laïcité, le multipartisme, la diversité culturelle et linguistique aux restes des algériens. Cela est impératif  tant pour nous les kabyles la question est désormais celle de vie ou de mort.

Il est temps de stopper aussi ces situations ridicules comme par exemple tenir une conférence régionale sur la Kabylie pour à la fin  accoucher d’une déclaration rédigée dans on intégralité en arabe  ou encore  reprendre des slogans dans cette même langue dans des marches à Tizi Wezzu, Vgayet ou Tuviret. C’est à force de faire des concessions que l’on finit par tout perdre.

Ne pas prendre position en ces moments troubles et incertains  face à ces manœuvres dévastatrices à l’encontre de notre identité et ce  à la vielle de ce trentième anniversaire du printemps noir, c’est se rendre complice du génocide identitaire de la Kabylie. Plus que jamais, pour nous kabyles, la question est : être ou ne pas être ?   

H@S/wbw
SIWEL 270945 MAR 21