(SIWEL) — Dans un fascicule intitulé  » La Kabylie à la (re)conquête de sa liberté », le Réseau Anavad a émis un document que l’on pourrait aisément intituler « La Kabylie pour les nuls ».

Siwel vous propose la lecture de ce fascicule qui reprend les grands axes de l’Histoire récente de la Kabylie : depuis la perte de son indépendance face à la colonisation française jusqu’à sa quête de libération totale, après la fausse libération de l’indépendance algérienne.

Avec le recul, les moments clé de l’Histoire mouvementée de la Kabylie, mis bouts à bouts, expliquent l’aboutissement naturel, logique et prévisible de sa quête pour la reconquête de sa liberté perdue en 1857, reconquise pour les autres et contre elle-même en 1962, avant de comprendre, à partir de 2001, que son salut réside dans la prise en main de son propre destin.

 

Un peuple issu d’une civilisation humaine millénaire, bien antérieure à celles qui prétendent la dissoudre aujourd’hui

La Kabylie est un territoire historique, ethnique et linguistique homogène, issue de la grande famille Amazigh (Berbère) peuplant l’Afrique du nord depuis l’antiquité. Les Amazighs ont constitué de grands royaumes numides à partir de – 200 avant JC. Le plus célèbre d’entre eux est celui du roi Massinissa.

La Kabylie indépendante

Traversant les millénaires et ses innombrables conquêtes, allant des phéniciens aux français en passant par les vandales, les arabes, les ottomans, la Kabylie a été indépendante jusqu’au 19è siècle. Alors qu’une grande partie des territoires (qui seront plus tard l’Algérie) est conquise par la France dès 1830, la Kabylie reste indépendante jusqu’à l’année fatidique de 1857.

Après 27 ans de résistance, vaincue, la Kabylie est rattachée aux possessions coloniales françaises d’Afrique du Nord, suite à la défaite des troupes de Fadhma N Summer contre les contingents français du général Randon, à Icherriden.

Le colonialisme français

Ecrasée par la supériorité militaire française, la Kabylie ne s’avoue pas vaincue pour autant. Elle vit au rythme de rébellions périodiques avant la grande révolte de 1871. Conduite par Mokrani et Aheddad, celle-ci durera une année entière avant d’être défaite en 1872.

La Kabylie subit alors de terribles représailles: amendes et séquestres de terres pharamineux, arrestations et déportations massives des insurgés en Nouvelle-Calédonie (les aïeux des actuels « Kabyles du Pacifique »).

Pour briser la forte cohésion sociale de la Kabylie et se prémunir de nouvelles révoltes, la France entame une politique de dépersonnalisation de la Kabylie. Elle subdivise le territoire kabyle en grande et petite Kabylie et, à travers l’implantation de ses «bureaux arabes» en plein pays kabyle, elle procède à une «arabisation» des noms et des lieux : At-Abbas devient Beni-Abbas, At-Yanni > Beni-Yanni, At-Douala > Beni-Douala, Iwadiyen > Ouadhias…

Quant à l’état civil, il fait table rase des noms kabyles et donne lieu à l’attribution de noms arbitraires, et différents, aux membres d’une même famille, avec des noms à consonances arabes en Ould…, en Ben…, ou en Bou… etc.,

Les bandits d’honneur

Ecrasés par la férocité de la répression coloniale lors de la grande révolte de 1871, et par la misère qui s’en suit, le phénomène des bandits d’honneur apparait en Kabylie pour tenter de rendre justice à la population kabyle saignée à blanc par l’administration coloniale française.

Parmi les plus célèbres des bandits d’honneurs, il y a Arezki Lbachir, guillotiné par la France le 14 mai 1895 à Azazga et Ahmed Umerri, assassiné le 16 février 1947 dans un guet-apens tendu par l’un de ses compagnons, Ali Ouacel, soudoyé par l’administration coloniale. Ce dernier a dû fuir vers la France pour échapper aux représailles de sa trahison

La lutte anticoloniale

Durement éprouvé par la colonisation, les kabyles vont massivement émigrer pour aller travailler dans les usines françaises. Ils y côtoient les mouvements prolétaires et découvrent des nouvelles formes de lutte.

En 1924, à Paris, des ouvriers kabyles créent un syndicat pour défendre les droits des ouvriers Nord-africains: «Le Congrès des ouvriers nord-africains de la région parisienne».

En 1926, ce syndicat devient le premier parti politique prônant la lutte pour le progrès social et l’indépendance de l’Afrique du Nord: l’Étoile nord-africaine (ENA). Parmi les huit (8) fondateurs de l’ENA, cinq sont Kabyles, tout comme la grande majorité des militants.

Mais par souci d’unification avec les arabophones, très peu représentés par rapport aux kabyles, les membres fondateurs élisent un arabophone à la présidence, Messali Hadj. Amar Imache, cerveau et père fondateur de l’ENA, sera progressivement écarté, comme la plupart des kabyles qui manifesteront leur attachement à la dimension amazigh de l’Algérie.

1949, la Crise dite « berbériste » : première manifestation explicitement raciste de la future Algérie arabo-islamique

La Crise berbériste éclate entre les partisans de «l’Algérie algérienne», défendue par le groupe de Bennai Ouali, et les partisans de «l’Algérie arabe», défendue par le groupe de Messali Hadj, sous influence du panarabiste libanais Chekib Arslan.

Les berbéristes sont diabolisés et accusés de vouloir diviser la nation algérienne parce qu’ils avaient commis le « crime » de revendiquer une Algérie "algérienne" et non une Algérie arabe.

La plupart des berbéristes seront exécutés au maquis ou livrés à l’administration coloniale qui les recherchaient à cause de leur activisme en faveur de la lutte armée contre la France alors que le courant messaliste activait encore pour une lutte politique.

1954 / Déclenchement de la guerre d’Algérie

Malgré l’idéologie panarabiste et la négation de l’identité amazighe, c’est avec fougue que la Kabylie s’engage dans la guerre d’Algérie, espérant qu’après l’indépendance, la berbérité aura la place qui lui revient dans cette Algérie qu’elle aura libérée par le sang de ses martyrs.

La Kabylie donne huit (8) colonels à l’Armée de Libération algérienne (ALN) et fournit l’écrasante majorité des combattants. L’essentiel de la guerre se déroule en Kabylie et dans les Aurès. Mais, au lendemain de l’indépendance, l’identité amazighe est officiellement niée.

Ben Bella prend le pouvoir par un coup de force militaire, grâce à l’armée des frontières jusque-là stationnée en Tunisie et au Maroc. Pour préparer le terrain, les panarabistes algériens avaient déjà assassiné, dès 1957, le kabyle Abane Ramdane, stratège politique et architecte du Congrès de la soumame.

L’indépendance algérienne

En 1962, l’Algérie est officiellement indépendante. Les accords d’Evian sont signés par le maquisard Kabyle, krim Belkacem. Comme Abane Ramdane, il sera ensuite assassiné à Francfort

Dès 1962, Ben Bella signifie à la Kabylie que «L’Algérie est Arabe! Arabe! Arabe!». Au terme de sept années de guerre contre la France coloniale, les kabyles ne sont plus des indigènes français, ils sont désormais des indigènes arabes

Dans une prochaine publication, la partie II reprendra le cours de l’histoire "très abrégées" de la Kabylie des maquis du FFS en 1963 au Printemps 1980 de Tizi-Ouzou.

zp,
SIWEL 131717 avr 15

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