PARIS (SIWEL) – Nafa Kireche, ministre chargé des Institutions et les Organisations en France au sein du Gouvernement Provisoire Kabyle (Anavad) répond dans cet entretien aux questions d’actualité touchant la Kabylie, du lever historique du drapeau kabyle au Nations Unies aux attaques du régime colonial algérien aux abois face aux avancées des souverainistes kabyles :

 

Monsieur le Ministre, les évènements semblent s’accélérer pour la Kabylie et la cause que vous portez. Revenons sur ces évènements. Tout d’abord, le président de l’Anavad a été la cible d’attaques de la part de l’ancien premier ministre algérien et actuel président par intérim du RND Ahmed Ouyahia. Celui-ci lui a reproché de vouloir "vendre le pays aux juifs". Quelle est votre réaction ?

Comparons d’abord les deux personnages. D’un côté, vous avez Ahmed Ouyahia, « orphelin de la parole », homme du sérail, soucieux de sa carrière et de ses avantages matériels. Il n’a absolument aucune conviction. Il a été recruté à l’université par la sécurité militaire de l’époque pour son profil d’apparatchik auquel on peut confier les sales besognes. Le régime pouvait ainsi utiliser ses origines kabyles pour mieux attaquer la Kabylie et ses symboles.
Et de l’autre côté, Ferhat Mehenni, orphelin de guerre, chanteur, défenseur de la cause berbère, emprisonné 12 fois, persécuté et qui a payé de sa chair son engagement, avec notamment l’assassinat de son fils Ameziane, tué par des hommes du même profil qu’Ahmed Ouyahia. Il a choisi de vivre pour ses idéaux et il les défend avec détermination. Au détriment même de ses intérêts matériels puisqu’il a toujours refusé les propositions alléchantes du régime algérien.
Il n’y a nul besoin d’aller plus loin pour comprendre que tout sépare ces deux hommes et il est donc normal qu’ils se combattent. Ouyahia a choisi la mangeoire, Ferhat a choisi l’Histoire.
Lors de la création du GPK, Ouyahia avait réagi en qualifiant l’évènement de "tintamarre". 5 ans plus tard, il reproche à ce même "tintamarre" de vouloir détruire l’Algérie et "vendre le pays aux juifs"…

Pensez-vous que ces propos, clairement antisémites, vont freiner Ouyahia dans ses ambitions ?

Sur le plan interne, Ouyahia est déjà "grillé". Ses parrains l’ont lâché en rase campagne et les temps vont être compliqués pour lui. Ses propos antisémites dénotent un affolement de sa part. Je pense qu’il s’est définitivement discrédité au niveau international. Quand on est antisémite, comploteur et conspirationniste, on n’a pas sa place dans le concert des dirigeants de ce monde.
Il est donc fini des deux côtés : interne et externe.

Un mystérieux groupe a attaqué Ferhat Mehenni et le maire PS de Quimperlé Michaël Quernez, qui a invité le président du GPK à l’occasion de la semaine internationale "regards croisés sur le monde". Le site algérien "Algérie patriotique" a publié l’attaque. En savez-vous plus ?

Tout d’abord, je tiens à vous confirmer que le président du Gouvernement Provisoire Kabyle clôturera bien cet évènement. Pour le reste, cela reste une énigme. Il n’y a pas de signataire en dehors d’une obscure « Association des Franco-Algériens » (AFAL), au demeurant plus algérienne que française comme l’a présentée le journal en ligne qui l’a relayée et dont on connaît les liens avec la pègre d’Alger au pouvoir. Il est de notoriété publique que le responsable du site n’est autre que le fils de Khaled Nezzar.
Si vous voulez mon avis, je pense qu’il y a d’abord, de la part de ce site, la volonté de créer un buzz avec les kabyles. Car les articles traitant de la Kabyle, du MAK (Mouvement pour l’Autodétermination de la Kabylie) et du Gouvernement Provisoire Kabyle sont ceux qui génèrent le plus de visiteurs et de commentaires, permettant de faire vivre le journal.
Ensuite, je ne vous cache pas ma méfiance vis-à-vis des nationalistes algériens vivant en France. Je pourrais citer Amar Saadani, mais en réalité, toute la nomenclatura algérienne est concernée. Ses membres possèdent tous la double nationalité.
Enfin, la perspective pour ces tenants du nationalisme algérien de perdre la partie kabyle du pays leur donne des sueurs froides. Ils savent que les kabyles sont l’élite du pays et qu’ils incarnent tout ce qu’il y a de positif en Algérie. Ces derniers jouissent d’une très bonne image à l’étranger, où ils s’intègrent sans problèmes et participent activement au tissu économique des pays où ils s’installent. Sans les Kabyles, il ne restera de l’Algérie que l’islam, l’arabisme et le terrorisme, éternellement résiduel, le tout entretenu par un régime corrompu. Autant dire, rien. La Kabylie doit se libérer de toute urgence afin de ne pas être entraînée dans ce néant.

Les médias algériens parlent de plus en plus du MAK et du GPK. Faut-il y voir un lien avec les restructurations qui ont lieu dans le sérail ?

Je pense effectivement que le général Toufik a joué un rôle important dans l’étouffement médiatique des activités du MAK et de l’Anavad. Il a des origines kabyles qu’il n’assume pas et comme chez tous les kabyles aliénés, le zèle est de rigueur contre les défenseurs de l’identité kabyle. Il faut montrer patte blanche pour se faire recruter et profiter des miettes du pouvoir ; mais à un moment ou un autre, ils se feront toujours éjecter comme des malpropres. Si eux renient leur identité kabyle, les décideurs algériens ne s’en servent qu’en tant que tels. Celui qui trahit les siens n’inspire confiance à personne, à fortiori à son propre ennemi !
Le général Toufik était au DRS un décideur kabyle antikabyle. Son départ a peut-être déverrouillé certaines choses dans les médias. Mais je pense que c’est temporaire, le temps que les nouvelles stratégies se mettent en place. D’ailleurs, au lendemain de l’internationalisation de la question kabyle par le Maroc à l’ONU, les médias algériens ont tous reçus l’ordre de ne rien en dire immédiatement. La presse algérienne est, de nouveau, muette, muselée par le remplaçant de Toufik.
Son départ est toutefois une bonne chose. Toufik était la caution kabyle de la haute hiérarchie du régime et nos opposants ne se faisaient pas prier pour l’utiliser contre nous : Dès lors que Toufik est kabyle, ils n’hésitent pas à dire à qui veut les entendre que ce sont les Kabyles qui gouvernent l’Algérie. En oubliant que ce n »est d’abord que pour son antikabylisme qu’il était maintenu à son poste.

Le président de l’Anavad s’est rendu récemment à New York pour y procéder à la levée du drapeau kabyle devant le siège de l’ONU. Quelle est la réelle portée de cet acte ?

La portée est forcément symbolique. New York, l’ONU… Nous sommes au cœur des lieux où se retrouvent les pouvoirs mondiaux. Y lever le drapeau de notre nation était important. Et c’est évidemment une fierté énorme pour tous les Kabyles qui se respectent. L’une des mamelles de notre identité est le refus de tous les asservissements. Cet acte symbolique traduit notre aspiration à l’indépendance et à la liberté.
Puisque nous évoquons cet évènement, je tiens à dénoncer le comportement mesquin du "PNListe" Hacène Hireche qui usurpe le titre de « docteur en sciences économiques » et qui, aussitôt que le président Mehenni avait annoncé sa décision de lever le drapeau kabyle devant l’ONU, a fait le déplacement à New York pour tenter le sabotage de cette opération symbolique. Il a démarché même le représentant du MAK aux Etats-Unis pour lui demander de ne pas assister à la levée du drapeau kabyle. Il souhaitait dissuader les kabyles des Etats Unis d’y prendre part pour isoler notre président. Il n’y a aucun acharnement de ma part contre lui, je ne relate que des faits qui m’ont été rapportés par des militants sincères et que je ne peux taire sans faire violence à la vérité. Le parcours de Hacène Hireche est incompréhensible, pour le suivre, il faut s’équiper d’un GPS…

Restons à New York et à l’ONU. Dernièrement, le représentant adjoint du Royaume du Maroc au sein des instances de l’ONU, Abderrazak Laassel, a défendu publiquement et officiellement, dans le cadre du 70e anniversaire de la création de cette structure, le droit du peuple kabyle a son autodétermination…

Il existe pourtant des esprits chagrins qui veulent transformer cette victoire historique du peuple kabyle, du MAK et de l’Anavad en défaite en essayant de s’attaquer au Roi du Maroc. Nous sommes toujours dans les méthodes de la Gestapo. Quand on veut effacer une, idée, un acte on s’attaque à son porteur, son symbole et son auteur. Toutefois, les nuages ne cachent le soleil que momentanément et la lumière finit toujours par triompher de ceux qui la combattent. C’est un véritable coup de tonnerre dans le milieu diplomatique et le président du Gouvernement Provisoire Kabyle a remercié les autorités marocaines pour cet événement historique. Le peuple marocain est un peuple frère et le Maroc est un pays respectable. L’Algérie harcèle le Maroc sur la question du Sahara Occidental et, parallèlement, applique non seulement une politique de génocide culturel à l’intérieur de ses frontières, mais se comporte en Etat colonialiste en Kabylie. C’est totalement incohérent, criminel, et nous tenons à le dénoncer.
Notre cause avance à grand pas, le travail conjugué du MAK sur le terrain et du GPK au sein des instances internationales commence petit à petit à payer.
Pour mieux avancer ensemble, à terme, il serait souhaitable que nos amis marocains ouvrent une représentation kabyle au Maroc. Nous en serions fiers et honorés.

Vous évoquiez le travail du MAK sur le terrain. Ou en sont les préparatifs du congrès du mouvement souverainiste kabyle au début de l’année prochaine ?

Je m’entretiens régulièrement avec le président du MAK, Monsieur Bouaziz Ait-Chebib, dans le cadre de la préparation de ce congrès. Il revêt un caractère très important pour la Kabylie compte tenu du contexte et de l’évolution de la situation. Il est programmé pour le 5 février 2016. Plusieurs précongrès vont avoir lieu. Des régions ont été délimitées pour les accueillir et les travaux ont d’ores et déjà commencé. Les régions retenues sont :
– Vgayet/Jijel/Setif
– Bouira/Bordj-Bou-Arreridj
– Tizi-Ouzou/Boumerdes
Les universités, par le biais d’un pôle universitaire, seront mises à contribution. Leur rôle sera très important car il s’agit des étudiants, futurs cadres du MAK et nous l’espérons, de la future nation kabyle.
Des précongrès auront également lieu au sein de la Diaspora. Elle sera divisée entre l’Europe et l’Amérique du Nord.
Ils travailleront autour des thèmes qui ont trait à l’évolution de la situation en Kabylie, sur le plan interne et externe, les moyens à plus ou moins long terme pour parvenir à nos objectifs et une charte qui aura pour but de délimiter les principes que chaque militant devra respecter, etc…
J’appelle donc les Kabyles à se mobiliser dans le cadre de ce congrès qui doit dessiner les contours de l’Etat-nation Kabyle.

Un dernier mot sur le président du GPK, qui sort un ouvrage intitulé "Noël en otage" aux Editions Michalon…
J’ai eu l’honneur de lire son livre en avant-première. Cela traite de la prise d’otage de l’avion Alger-Paris d’Air France en 1994. Il relate les évènements avec le recul du temps. Ferhat donne une dimension politique à son récit. On y apprend des choses nouvelles. Je n’en dis pas plus. J’invite les kabyles à se le procurer. C’est par exemple une bonne idée de cadeau de noël…

Propos recueillis par Siwel

wbw
SIWEL 312345 OCT 15

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