DIASPORA (SIWEL) — « Ce qui est étonnant après l’assassinat d’Hervé Gourdel, c’est la position scandaleuse des médias et de la classe politique française. Aussitôt l’information tombée, tout le monde s’est aligné derrière les absurdes positions algériennes en donnant de facto à la Kabylie un deuxième coup de poignard dans le dos. Il est vrai que depuis « l’année de l’Algérie en France » ayant fait suite aux événements de 2001, les pseudo-spécialistes de l’Algérie et les hommes politiques se sont évertués à défendre l’Algérie arabo-musulmane, une et indivisible. Ni la Kabylie, pourtant souvent présente dans leur discours à l’époque du président Zeroual dont ils voulaient se débarrasser – Le président Chirac avait même rendu hommage à Matoub Lounès !-, ni les Touaregs, ni les Mozabites n’ont eu droit à une information, une analyse ou à une prise de position dignes de ce nom, malgré les événements majeurs les ayant affectés. »

 


El Mouradia : le sanctuaire de l’islamisme en Algérie

Hervé Gourdel ces jours-ci, Albert Ebossé il y a un mois, les quatre pères blancs de Tizi Ouzou ( Jean Chevillard, Charles Deckers, Alain Dieulangard, Christian Chessel, le 27 décembre 94), Matoub Lounes ( le 25 juin 1998) et tant d’autres victimes du terrorisme islamiste en terre kabyle, visiblement manipulé par les généraux algériens, n’auraient jamais été assassinés dans une Kabylie gouvernée par les Kabyles.

Il en aurait été forcément autre et n’étaient l’âge et les aléas de la vie, seraient encore en vie. La nature des rapports humains qu’entretiennent les Kabyles entre eux et avec leurs hôtes étrangers, le caractère syncrétique de leur pratique religieuse et leur esprit laïc en font un peuple de paix, de liberté et de tolérance. Hélas, le pouvoir algérien en a décidé autrement.

Encore une fois, Alger a essuyé le couteau sur le dos de la Kabylie. Cette dernière, faut-il le rappeler, est le seul territoire en Algérie à avoir dit non aux islamistes depuis 1991, lors des élections législatives, remportées haut la main par les islamistes du FIS dans le reste de l’Algérie. C’est la Kabylie qui initia la résistance en s’organisant contre l’intrusion des terroristes dans ses villages. Pour cette position courageuse et glorifiante, la Kabylie avait enterré, à cette époque, les meilleurs de ses enfants, assassinés surtout à Alger.

La Kabylie n’est devenue le théâtre de la confrontation militaires-islamistes que par la volonté d’El Mouradia (siège de la présidence algérienne) sous Zeroual, mais surtout sous Bouteflika. Suite aux accords de paix signés entre le pouvoir et l’AIS (Armée Islamique du Salut) en 1997, Bouteflika va tenter une « concorde civile » (1999) en offrant sa protection aux terroristes les plus sanguinaires. Une fois ceux-ci rentrés des maquis, il les envoya en Kabylie pour exercer leurs talents dans les mosquées, pour fanatiser les croyants, avec un statut de fonctionnaires de l’Etat. Par ailleurs, plusieurs centaines d’agents du DRS qui avaient infiltré les maquis islamistes, eurent leur ordre de mission pour aller se faire passer pour des terroristes islamistes en Kabylie.

Bouteflika et le DRS espéraient, en transférant la violence terroriste en Kabylie, engager une bataille entre fanatiques religieux et Kabyles laïcs pour qu’ils s’en tirent avec le bon rôle d’arbitre. Parallèlement à cela, en favorisant le banditisme en Kabylie, ruiner l’économie de cette région et provoquer un exode des populations vers les zones arabophones où elles se seraient diluées.

Le pouvoir algérien a ouvertement réveillé les vieux démons de l’antikabylisme ambiant pour camoufler le rôle précurseur et majeur de la Kabylie dans l’éveil du nationalisme algérien qui bien-sûr met toujours en cause la légitimité de l’Algérie arabo-musulmane imposée après l’indépendance.

Les Kabyles sont haïs à cause de leur culture laïque et leur engagement pour le combat démocratique et depuis 2001, pour leur propre liberté.

La grande majorité des médias algériens et quelques politiciens véreux au service du pouvoir feignent d’ignorer le caractère tolérant et universel de la Kabylie, exprimé lors de tous les votes ayant eu lieu depuis l’introduction du multipartisme et surtout lors des récentes manifestations du Mouvement pour l’Autodétermination de la Kabylie. Ils poussent le ridicule jusqu’à attribuer aux souverainistes kabyles l’assassinat du français Hervé Gourdel, dans le but de provoquer une intervention étrangère.

Personne n’ignore qu’en Algérie, les médias et un bon nombre de partis politiques sont à la solde du pouvoir qui est leur principal bailleur de fonds. Ils obéissent à une stratégie de communication précise émanant de la présidence avec l’aval du DRS (services secrets algériens, véritables maîtres de l’Algérie).
L’une des tâches majeures assignée à cette presse est d’exploiter à fond des informations susceptibles d’avilir la Kabylie.

S’il en faut, les militaires, qui scrutent la Kabylie à la loupe, provoquent les évènements pour saboter économiquement la Kabylie (voir le nombre de kidnappings et d’hectares brûlés par les militaires chaque été). Elle est surveillée comme on surveille le lait sur le feu. Tout ce qui peut nuire à sa réputation est exploité au maximum.

Mais l’influence maléfique du régime contre tout ce qui est kabyle dépasse les frontières algériennes. Matoub Lounès, fervent défenseur de la laïcité et de la démocratie, ennemi juré des islamistes et du pouvoir dictatorial arabo-islamiste, idole des Kabyles, assassiné dans des circonstances troubles non encore élucidées, est désigné officiellement par la mairie de Paris de connivence avec l’ambassade d’Algérie en France comme “Chanteur algérien assassiné en Kabylie“. Son assassinat rappelle étrangement celui du français Hervé Gourdel. La volonté du pouvoir algérien de salir la Kabylie n’a aucune limite.

Pour Alger, les Kabyles sont les nouveaux Juifs d’Algérie, du fait de leur hostilité à l’impérialisme panarabe.

La violence terroriste, sous couvert d’islamisme, est sciemment entretenue en Kabylie. Elle sert de justification à une présence militaire dont l’objectif est de parer à tout référendum d’autodétermination du peuple kabyle pour son indépendance.

Ce qui est étonnant après l’assassinat d’Hervé Gourdel, c’est la position scandaleuse des médias et de la classe politique française. Aussitôt l’information tombée, tout le monde s’est aligné derrière les absurdes positions algériennes en donnant de facto à la Kabylie un deuxième coup de poignard dans le dos. Il est vrai que depuis « l’année de l’Algérie en France » ayant fait suite aux événements de 2001, les pseudo-spécialistes de l’Algérie et les hommes politiques se sont évertués à défendre l’Algérie arabo-musulmane, une et indivisible.

Ni la Kabylie, pourtant souvent présente dans leur discours à l’époque du président Zeroual dont ils voulaient se débarrasser – Le président Chirac avait même rendu hommage à Matoub Lounès !-, ni les Touaregs, ni les Mozabites n’ont eu droit à une information, une analyse ou à une prise de position dignes de ce nom, malgré les événements majeurs les ayant affectés.

La France passe aussi sous silence, la présence en surnombre des militaires algériens en Kabylie et n’évoque jamais le plan proclamé haut et fort par le pouvoir algérien visant à aligner la Kabylie sur le reste de l’Algérie en l’arabisant et en l’islamisant à l’extrême, par ses écoles, ses chaînes de télévision et ses mosquées. Elle glorifie Bouteflika, malgré l’assassinat en 2001 de 127 jeunes manifestants Kabyles désarmés, réclamant la démocratie et le respect des valeurs universelles, malgré les incendies des forêts et des oliveraies provoqués notoirement par l’armée algérienne dans le but, proclamé mais jamais vérifié sur le terrain, de lutter contre l’islamisme.

La France peut-elle se poser cette question simple ? Comment croire que le régime algérien puisse lutter contre l’islamisme alors qu’il protège ses chefs, le cultive, l’alimente, le rénove et le propage dans ses écoles obscurantistes, ses 15000 mosquées et ses dizaines de puissants médias ?

Pourtant entre les peuples kabyle et français, une nouvelle page plus apaisée et sereine commence à s’ouvrir. L’histoire douloureuse faite de guerres coloniales (1857, 1871, 1954-1962) et d’émigration (présence de plus 2 millions de Kabyles en France), cède graduellement la place à l’émergence d’un profond respect mutuel.

Curieusement, c’est au moment où émerge une véritable conscience nationale kabyle, propagée par les Kabyles vivant sur le sol français depuis plusieurs générations et où le peuple français commence à s’interroger sur les fréquentations douteuses de leur classe politique que, visiblement la France préfère privilégier les intérêts des grands groupes financiers moyen-orientaux au détriment des droits culturels et sociaux des peuples amazighs, et que la Kabylie est décriée soudainement comme terre soutenant le terrorisme.

Cette position de la France vis à vis de la Kabylie est dictée par ses accointances avec Alger. Elle nous rappelle les événements téléguidés ayant provoqué l’intervention de la France au Mali. Ces deux positions relèvent d’un véritable déni identitaire contre les peuples touareg et kabyle.

Entrainée dans ce tourbillon, la France, si sa classe politique ne se ressaisissait pas rapidement, perdra à coup sûr ce qu’elle a de plus précieux en Afrique du Nord : la sympathie du peuples kabyle et des peuples amazighs pour le peuple français, sa civilisation et ses valeurs démocratiques.

En Kabylie comme en France, l’exécution d’Hervé Gourdel par les terroristes islamistes activant en Kabylie avec la complicité du pouvoir algérien n’a laissé personne indiffèrent.

Un jour ou l’autre, les Français sauront que le sanctuaire de l’islamisme en Algérie se trouve à El Mouradia (repaire du président algérien) et non en Kabylie.

Lyazid Abid
Vice-président de l’Anavad (Gouvernement provisoire kabyle)

Laisser un commentaire