Décès du chanteur kabyle Djamel Allam à 71 ans
PARIS (SIWEL) — L’interprète auteur-compositeur kabyle, Djamel Allam, est décédé ce samedi 15 septembre 2018 dans un hôpital à Paris à l’âge de 71 ans après avoir lutté contre le cancer du pancréas.
 
Il est l’une des icônes de la chanson kabyle moderne, il a enregistré onze albums. Artiste éclectique, comédien, animateur radio, il a composé la musique de plusieurs documentaires et longs-métrages et réalisé des courts-métrages.

Bio express :

  • 1947 : Naissance le 26 juillet à Ilmaten, village des At Waghlis
  • Premiers pas en musique au conservatoire municipal de Vgayet
  • 1967 : Il débarque à 20 ans à Marseile où il est engagé comme machiniste au Théâtre du Gymnase, un haut lieu culturel phocéen où il croise les deux Georges : Brassens et Moustaki, Boby Lapointe, Patrice Chéreau  ainsi que Léo Ferré dont il devient un ami très proche.
  • 1969 : Ecrivant déjà des chansons en kabyle qu’il interprète dans un cabaret du port phocéen où se produit un certain Bernard Lavilliers qui, séduit par la voix, les compositions et la présence scénique de Allam, lui suggère quelques bonnes adresses d’espaces parisiens « rive gauche ».
  • 1971 : Retour en Kabylie où il mène de front plusieurs activités à Alger : producteur et animateur à la radio francophone Chaîne 3 et directeur artistique du cabaret la « Voûte » à Moretti où il accueille Léo Ferré, Marc Ogeret
  • 1972 : Première grande apparition de Djamel Allam en première partie d’Arezki Belkacem et Brigitte Fontaine dont il adaptera en kabyle leur titre « L’Accident », à la salle El Mouggaar à Alger
  • 1974 : De retour à Paris, il collabore à l’émission « Pas de panique » sur la radio France Inter avec Claude Villers  qui le recommande au producteur des Disques Escargots. Gilles Bleiveis produit en 1974 son premier album « Arǧut » (Laissez-moi raconter),
  • 1978 : Sortie de l’album «Argu» (Les rêves du vent), qui rencontre un grand succès auprès du grand public, l’opus « Mara d-yughal » (quand il reviendra) lui faisant acquérir sa notoriété jamais démentie depuis
  • 1981 : Sortie de l’album «Si Slimane»
  • 1984 : Il est comédien pour le cinéma dans les films tels que « Les sacrifiés », Les folles années du twist » ou encore « Fort Saganne » aux cotés de Gérard Depardieu, Philippe Noiret, Catherine Deneuve et Sophie Marceau
  • 1984 : Il écrit des musiques de films et de documentaires, dont «La Goutte d’or» de Daniel Duval, diffusé sur TF1, ainsi que « Prends dix-milles balles et casse-toi », « La plage des enfants perdus »…
  • 1985 : Sortie de l’album «Salimo», du prénom de son fils
    puis M’ara d-yughal (Quand il reviendra).
  • 2001 : Sortie de l’album « Guraya », la bonne mère aux pieds de Vgayet qui veille sur la Kabylie maritime
  • 2006 : Sortie d’un coffret de 9 albums « Tella tamkant deg ul-iw » (Il y’a une place dans mon coeur)
  • 2008 : Sortie de l’album « Le youyou des anges »
  • 2012 : Il réalise un cours-métrage muet « Banc public », qui a obtenu l’Olivier d’Or au Festival du film amazigh de 2013 à Tizi-Wezzu

Anecdote :

Au cabaret la « Voûte » à Moretti, un soir où il reprenait comme d’habitude les chansons de Léo Ferré et de Georges Brasens, Kateb Yacine et son compère le peintre kabyle M’Hamed Issiakhem déboulent. Ce dernier interpelle Djamal Allam en lui disant : « Pourquoi tu ne chantes pas en kabyle ? » Avant que Djamel Allam ne dise quoi que ce soit, Issiakhem poursuit : « Ferré et Brassens trouveront toujours des interprètes, tandis que la chanson kabyle, si tu la chantes pas, personne ne le fera à ta place« . Le lendemain, il revient avec une ballade. Quant il a eu fini de chanter « Ur-ttru » [Ne pleure pas], le public est resté pétrifié. Djamel Allam chanteur kabyle vient de naître.

En août 2017, suite à son hospitalisation en Kabylie, une rumeur sur son décès a circulé, Djamel Allam a alors rassuré ses fans : « Au début je ne voulais pas que ça se sache. J’ai un cancer du pancréas qui n’est pas facile à soigner. J’ai fait de la chimiothérapie. Je suis à ma troisième séance. Je dois retourner pour des analyses en France (…) Comme j’ai vécu 40 ans en France, j’ai ma carte vitale donc je ne paie rien, j’arrive pour l’instant à tout prendre en charge moi-même. En Algérie, je ne pouvais pas rester parce que c’est difficile de trouver les médicaments et les spécialistes pour le traitement de la pathologie. Je n’ai jamais perdu espoir, la mort est la fin de tout être humain (…) »

Mais tels des charognards de la récupération, le ministre algérien de la Culture et le Wali de Vgayet s’étaient dépêchés chez lui le samedi 26 août 2017 à son domicile de Vgayet.

Bien que Djamel Allam ait été ces dernières années controversé pour ses prises de position jugées pro-pouvoir algérien, notamment :

  • en 2014 : avec sa participation dans un clip tourné par un collectif d’artistes algériens appelant à soutenir le 4ème mandat de Bouteflika
  • en 2015 : avec sa participation à la supercherie « Constantine, capitale de la culture arabe » (sic) (alors que l’ancienne Cirta était la capitale amazighe de la Numidie)

Cependant, l’apport de l’artiste à la chanson kabyle est indéniable. Qu’il repose en paix.

wbw
SIWEL 151800 SEP 18