GENÈVE (SIWEL) – Le 23 juin 2015 Nadia At Uissa et Sakina Aït Ahmed se sont rendues au Palais des Nations à Genève pour participer à la 8ème session du Mécanisme d’experts des Nation Unies sur les droits des peuples autochtones sur le thème :

« La déclaration sur les droits des peuples autochtones »

Madame Nadia At Uissa est intervenue au nom des collectif de femmes de kabylie et des amazighs de France pour alerter les experts de l’arrestation des détenus mozabites, de leur détention arbitraire ainsi que de la grève de la faim entamée par Kamel Ddin Fekhar dont la santé ne cesse de se dégrader.

Madame Sakina Aït Ahmed a présenté à l’assistance, une communication au nom du Collectif de femmes du printemps noir de Kabylie, elle s’est présentée aussi comme membre du Mouvement pour l’Autodétermination de la Kabylie et du Gouvernement Provisoire Kabyle

Les recommandations ont reçu un écho très favorable des experts. A la demande du DOCIP « Centre de recherche et d’information des peuples autochtones », une copie de la communication lui a été remise .
La délégation kabyle a saisi cette occasion pour réitérer le soutien de la Kabylie au peuple mozabite et exiger la libération de Kameleddine FEKHAR ET SES 22 COMPAGNONS

On ne lâche rien les amis la vie de ces hommes très courageux est en DANGER! Ils ne les feront pas taire ! Continuons à les soutenir !

Siwel publie ci-après la communication de Madame Sakina Ait Ahmed dans son intégralité.

 

8ème session du Mécanisme d’experts des Nation Unies sur les droits des peuples autochtones convoquée par le Conseil des droits de l’Homme et organisée par le Haut-Commissariat aux droits de l’homme.

M. Le Président,
Mmes, Mrs les membres du MEDPA,
Chers amis autochtones,
Chers amis des autochtones,
Mmes, MM.

Item 8: United Nations Declaration on the Rights of Indigenous Peoples
« Déclaration sur les droits des peuples autochtones »

Azul felawen

Mesdames Messieurs, je vous transmets les salutations du Collectif de femmes du printemps noir de Kabylie.

Nous, collectif de femmes du printemps noir de Kabylie, félicitons le mécanisme d’expert pour toutes les thématiques qu’il a abordées, car elles sont d’une grande utilité pour faire avancer les luttes et les droits des peuples autochtones.

Ces trente dernières années, les droits des peuples autochtones sont devenus une composante importante du droit international et des politiques internationales, sous l’impulsion et la participation de mouvements dirigés par des peuples autochtones qui sont considéré, c’est très important, comme des sujets de droit à part entière, la société civile, les mécanismes internationaux et des États aux niveaux national, régional et international.

Le système de protection des droits de l’homme des Nations Unies − ses mécanismes, normes et politiques − ont été au cœur de cette évolution. Le Groupe de travail sur les peuples autochtones ayant à cet égard joué un rôle précurseur, rôle que continuent d’assumer le Conseil des droits de l’homme et ses mécanismes, en coopération avec d’autres acteurs importants, notamment l’Instance permanente de l’ONU sur les questions autochtones, la Convention 169 de l’OIT.

L’une des principales réalisations a été l’adoption par l’Assemblée générale en 2007 de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, qui, en 2010 a recueilli le soutien de la grande majorité des États Membres de l’ONU. Fruit de plusieurs décennies de négociations entre les États et les peuples autochtones. La Déclaration témoigne d’un bel esprit de partenariat. Elle applique les principes relatifs aux droits de l’homme aux peuples autochtones en tenant compte de leur situation spécifique, elle contribue, ainsi à mettre un terme à leur exclusion historique du système juridique international.

La Kabylie a été indépendante jusqu’en 1857. Il a fallu 17 années de lutte pour que l’armée française brise le bouclier kabyle dont elle s’est empressée de détruire les petites industries et l’organisation sociale. C’est un peuple qui a toujours été indépendant du reste de l’Algérie. L’appellation tant par les kabyles « Tamurt n iqvayliyen » que « Blad qbayel » par les arabophones, traduit « pays kabyle »le démontrent amplement.
Au jour de l’indépendance de l’Algérie, nous avions espéré l’avènement d’une Algérie algérienne, empreinte de la langue et de la culture amazigh du pays ainsi que de notre laïcité ancestrale tolérante envers toutes les croyances, qui consacre la liberté de conscience et la séparation du spirituel et du temporel. Or les dictatures successives, ont imposé une seule idéologie, celle de l’arabo islamisme : l’arabe moyen oriental importé et imposé comme langue nationale et officielle et l’Islam comme la religion de l’Etat.

En 1980, les événements du Printemps berbère ont mis la Kabylie sens dessus dessous en raison de l’interdiction discriminatoire au motif fallacieux « de trouble à l’ordre public » le jour même, d’une conférence sur les Poèmes Kabyles anciens que devait animé un écrivain kabyle bien connu, Monsieur Mouloud Mammeri attendu, par des centaines de personnes (étudiants, enseignants …)à l’université de Tizi Ouzou.
L’artiste Matoub Lounes, chanteur kabyle engagé, assassiné par l’Etat algérien le 25 juin 1998, a fait de cet événement une chanson témoignage « Wad Aissi ».

En 2001, la Kabylie a été victime des événements tragiques du Printemps noir Kabyle. Le 18 avril 2001, Massinissa Guermah, un jeune lycéen, est tué d’une rafale d’arme automatique par les gendarmes dans les locaux de la gendarmerie à (Ath Dwala). Durant le mois d’avril, plus de 128 jeunes sont assassinés, par les gendarmes qui n’ont pas hésité à leur tirer dessus au moyen de balles explosives sur l’ordre de l’Etat algérien. On y dénombre au moins 5000 blessés.

Le 14 juin 2001, lors d’une marche, environ 3 à 4 millions de kabyles sont descendus à Alger pour remettre au Président Bouteflika un texte de revendications démocratiques: La plateforme d’El Kseur. Les manifestants sont stoppés par les forces de l’ordre à l’entrée d’Alger La répression est féroce, elle fait 8 victimes, et 130 personnes sont portées disparues — elles seront soit retrouvées mortes, soit hospitalisées, soit mises en garde à vue. De nombreux affrontements vont succéder à cette manifestation, entraînant des dizaines de morts, des centaines de blessés et de multiples arrestations

Depuis cette date du 14 juin 2001, une grande partie du peuple kabyle qui ne cesse de l’élargir, revendique explicitement le principe de son Autodétermination ! Les événements tragiques que vivent actuellement les Mozabites, autre peuple amazigh, dont les membres se sont installés il y a des millénaires dans la vallée du Mzab au Sud de l’Algérie conforte cette revendication de l’Autodétermination.

La Kabylie en particulier et les régions Amazighes d’Algérie en général, sombrent de plus en plus dans le chaos économique, culturel, social et environnemental. Chez nous, l’Etat construit surtout des prisons, des casernes militaires, des commissariats de police, des mosquées et des écoles coraniques. Les quelques unités économiques existantes ferment les unes après les autres, les investisseurs privés sont découragés par l’insécurité organisée et les très nombreux obstacles bureaucratiques. Nous ne pouvons que penser qu’il s’agit-là, d’une véritable politique d’appauvrissement de nos territoires .

Bien que l’ensemble de ces lois ne cessent de leur être favorables, les peuples autochtones sont confrontés à de nombreuses difficultés. En effet, aujourd’hui les peuples autochtones vivent sur le territoire d’États indépendants, or ils dénoncent avec force, une situation de « colonisés » qui les empêchent d’exercer leur droit à disposer d’eux-mêmes.C’est en vertu de leur statut de peuple qu’ils peuvent déterminer leur statut politique, et assurer leur développement économique, social et culturel et de protection de leur environnement

Si l’ensemble des résolutions sous la forme d’affirmations contenues dans « La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones » sont très positives, dans la réalité sont elles vraiment appliquées par les États ?

Nous pensons qu’elles ne sont ni respectées ni appliquées notamment par des pays post indépendants qui ont instauré des régimes dictatoriaux. Pour éclairer les Experts et l’assistance, après avoir cité précédemment la situation de répression d’injustice et de discrimination que vit la Kabylie, comme d’autres peuples amazighs, nous informons que depuis plusieurs années, les mozabites sont victimes d’apartheid voire d’une épuration ethnique, de déplacements forcés et d’assassinats à huis clos par l’Etat algérien tout cela parce qu’ils ont le malheur d’être assis sur des richesses minières, pour rappel, leurs villes sont classées au patrimoine mondial de l’UNESCO

Suite au courrier du 02 juillet 2015 adressé à Monsieur Ban ki-moon par Monsieur Kameleddin FEKHAR, militant des droits humains à Ghardaïa, pour l’informer de cette situation de violence où en une journée plus de 20 mozabites ont été assassinés, lui même et ses 22 compagnons ont été arrêtés et jetés en prison le 9 juillet sous les motifs fallacieux de :

Port d’armes- Atteinte à la sûreté de l’État- Atteinte à l’intégrité du pays- Constitution d’une association de malfaiteurs- Constitution d’association terroriste- Incitation à la haine et à la ségrégation- Incitation à la destruction des biens- Incitation à l’assassinat- Outrage à la police- Incitation au séparatisme.

C’est l’ultime punition pour avoir « osé » saisir les instances internationales et ceci est confirmé
par les propos du Premier ministre algérien « Kamel Ddin Fekhar est mort, c’est fini pour lui » .
Ils sont accusés de tous les maux alors qu’ils sont les victimes de toutes les exactions :
Les détenus ont été chargés à tel point qu’on aurait cru que ce sont les mozabites qui sont les agresseurs dans cette affaire alors qu’ils sont les victimes.

C’est pourquoi nous recommandons au MEDPA et aux instances de l’ONU :

-Tout entreprendre afin de faire respecter le droit à l’autodétermination qui est un droit fondamental.

-Nous nous en remettons à vous pour porter notre revendication en faveur d’une position plus CONTRAIGNANTE à l’égard des États en général qu’ils soient d’obédience démocratique ou pire encore de régimes dictatoriaux aux comportements inhumains, racistes et discriminatoires pour intensifier les moyens d’une application effective du droit des peuples autochtones à L’AUTODÉTERMINATION

-Nous, peuples autochtones, œuvrant pour la mise en pratique de la déclaration des nations unies des droits des peuples autochtones

-Recommandons aux nations unies de faire de la déclaration une convention afin de protéger et d’assurer les droits des peuple autochtones

-Les textes des nations unies sont les seuls moyens pacifiques qui s’offrent à nous, nous demandons au mécanisme des experts de consacrer la prochaine thématique aux droits de peuples autochtones à l’autodétermination

-Vulgariser la déclaration des nations unies des droits des peuples autochtones et le document final de la 1ère conférence mondiale des peuples autochtones auprès des population autochtones.

-Nous recommandons le renforcement des mécanismes de protection des militants de droits de l’homme qui sont les premières victimes de représailles et de harcèlement, des militants des droits de l’homme M’zab-amazigh sont emprisonnés et accusés à tort par les autorités algériennes, je rappelle qu’ils sont en grève de la faim depuis le 17 juillet 2015

Nous apprenons que la Catalogne s’achemine vers une déclaration unilatérale d’indépendance.

P/ Le Collectif de femmes du printemps noir de Kabylie

Sakina Aït Ahmed

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