CONTRIBUTION (SIWEL) — Contribution de Mack Ait-Aoudia sur le la fonction du policier et ses abus au sein des dictatures. Bien que le policier exécute des ordres, doit-il pour autant enterrer sa conscience et son intelligence pour devenir un bâton en faveur de la légalisation de l’injustice et de la répression? Le contributeur rappelle également que dans la société ancestrale kabyle, la fonction de policier n’existait pas. Ci-dessous la contribution dans son intégralité.

 

Citoyen kabyle mais policier algérien : le dilemme
Tout bon flic est un bon exécuteur. Mais exécuteur dans le cadre de la loi. Le flic est un fonctionnaire qui veille à ce que les lois et les règlements soient respectés et appliqués par les citoyens. Du moins, c’est ce que je pense devrait être un flic. Mais très souvent le flic est utilisé comme premier rempart pour protéger l’État et ses biens.

Dans bien des démocraties, l’utilisation des flics et autres forces de l’ordre pour faire régner la paix sociale est contestée. Bien des circonstances prêtent un avantage aux gouvernants avec cette force à leur portée sur les gouvernés. Des cas bien documentés, même dans les démocraties occidentales, font état d’abus de ce genre. Par contre, comme la justice reste une institution forte et indépendante, les gouvernés ont à leur tour un moyen légal de se faire justice.

Dans le tiers-monde et les pays à la voile comme l’Algérie, qui est un pays totalement désorganisé, dictatorial et corrompu, le flic est une simple force à la disposition des décideurs du régime qu’ils utilisent pour garantir la pérennité de leur régime militaro-islamiste. Le flic n’est bon qu’à mater et faire peur aux citoyens. Il n’est d’aucune façon le représentant de la loi et de l’ordre social mais l’incarnation même de la corruption étatique. Le peu de pouvoir en sa possession, il l’use sans scrupule et il ne gagne rien au retour si ce n’est des miettes et la perverse satisfaction d’avoir humilié de simples citoyens désarmés.

En Kabylie indépendante d’avant 1857, le flic comme entité représentée par un corps et des individus armés n’existait pas. C’était un pays sans flic ni prison. La paix sociale, l’ordre et le code de conduite sont dictés par la morale et les édits propres à chaque village. Ces derniers sont renforcés par diverses pratiques de dissuasion. Le flic en Kabylie est donc une introduction coloniale. Et c’est encore une force coloniale.

Parmi les éléments de cette force aujourd’hui, il y a des Kabyles. Des Kabyles qui voient et qui vivent l’injustice faite à ce peuple-même dont ils sont issus. Vont-ils aller contre l’intérêt de leur peuple à la manière des Harkis ? Vont-ils se rebeller et refuser de plonger dans les abîmes de l’injustice ? Ou ils vont simplement ménager la chèvre et le chou. Les uns joueront à l’autruche au nom de l’emploi et les autres joueront la carte des convictions politiques pour le slogan "Algérie unie et indivisible".

Peu importe les décisions des uns et des autres, l’histoire retiendra les faits et gestes de tout un chacun et de tous les flics. Souvenons-nous des chefs nazis qui ont prétexté au procès de Nuremberg en 1945-46 d’avoir obéi aux ordres, durant les atrocités commises lors de la Seconde Guerre mondiale, pour se justifier. Ils ont été condamnés par la justice et honnis par l’éthique. Car il n’est pas permis d’obéir à tous les ordres. C’est vrai aussi pour un flic, même pour un flic algérien. Même pour un flic algérien en Kabylie. Un ordre ne justifie pas la faute. Un ordre ne rend pas légal ou juste le geste fautif. D’aucune façon.

Mack Ait-Aoudia
SIWEL 112118 AOU 16

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