ALGÉRIE COLONIALE : LA QUADRATURE DU CERCLE OU COMMENT VIVRE LE DROIT DANS UN « PAYS » DE NON-DROIT ?

KABYLIE (SIWEL) — Prompte à stigmatiser, insulter et diffamer tout expert, agence, organisation ou homme politique qui émet des résolutions, analyse ou critiques divergentes sur l’action politique ou économique de la junte, les derniers à avoir fait les frais de ce bellicisme, les experts de la Banque Mondiale (BM), la junte militaire garde un silence de mort sur la dernière missive que lui a adressée un groupe d’expertes et d’experts, de l’agence du Haut-commissariat des Nations unies aux droits de l’homme (HCDH).Après les multiples condamnations et dénonciations, les rapports et recommandations par deux fois déjà du HCDH, de ceux du Parlement européen (PE), idem, de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples, ainsi que des organisations non gouvernementales de défense des droits de l’homme (ONG), adressés à la junte algérienne, tous restés en général lettre morte sinon des réponses biaisées pour certains ou la victimisation, le HCDH revient à la besogne pour saisir la junte récalcitrante sur un article de loi, en soi terrorisant, et dans sa définition et dans son esprit sur la définition du … terrorisme.

Il s’agit l’ordonnance n°21-08 et la loi n°20-06 du 22 avril 2020 particulièrement du sulfureux obscur article 87 bis du code pénal algérien « Est considéré comme acte terroriste ou sabotage, tout acte visant la sûreté de l’Etat, l’unité nationale et la stabilité et le fonctionnement normal des institutions par toute action ayant pour objet de : (…) œuvrer ou inciter, par quelque moyen que ce soit, à accéder au pouvoir ou à changer le système de gouvernance par des moyens non constitutionnels ; porter atteinte à l’intégrité du territoire national ou d’inciter à le faire, par quelque moyen que ce soit ». Un article tiré par les cheveux et des victimes, en majorité des Kabyles, de l’injustice et de l’arbitraire en cascade.

Une arme d’incarcération massive. Tous en prison. Une ordonnance qui enfonce (encore !) la crédibilité et l’image bien entamées de cette « Algérie » qui aspire à émarger auprès des nations civilisées en signant et ratifiant des conventions sur le respect des droits de l’homme pour mieux les violer après. Foutue cloaque condamnée à la médiocrité totalitaire.

Dans leur communication, les rapporteuses et les rapporteurs de l’ONU ont relevé « Certains actes énumérés dans le nouvel article 87 bis du code pénal pourraient aboutir à des poursuites, en violation du droit international des droits de l’Homme » et encouragent la junte « de suivre l’approche utilisée dans la résolution du Conseil de sécurité des Nations unies et la définition proposée par la rapporteuse spéciale sur la promotion et la protection des droits de l’Homme et des libertés fondamentales dans la lutte contre le terrorisme, afin de s’assurer que seuls les comportements de nature véritablement terroriste soient désignés et poursuivis comme tels en vertu de la loi algérienne ». Selon cette définition, « pour qu’une infraction soit qualifiée comme un « acte terroriste » conformément aux bonnes pratiques du droit international, trois éléments cumulativement présents : (a) les moyens utilisés doivent être mortels ; (b) l’intention de l’acte doit être de susciter la peur au sein de la population ou de contraindre un gouvernement ou une organisation à faire ou à s’abstenir de faire quelque chose ; (c) et l’objectif doit être de promouvoir un objectif idéologique ».

Un autre écueil soulevé par cette agence est l’installation, d’une commission de classification des personnes et des entités terroristes dans laquelle est instituée une liste des personnes et des organisations terroristes selon les caractéristiques de l’article 87 bis, et de l’inclusion en son sein de la formule « moyens non conventionnels » qui pourrait « avoir un impact sur les libertés d’expression, d’association et de réunion pacifique….(où) toute critique ou opposition au système de gouvernance tel qu’établi par la constitution de 2020 pourrait potentiellement être soumise au champ d’application de cet article » d’où la recommandation des experts de l’ONU à « établir, en droit et en pratique, un contrôle judiciaire ou législatif sur le fonctionnement et les activités de cette commission ainsi qu’à autoriser, dans le but de garantir un procès équitable, le recours contre ses décisions ». Ces textes, rappelle cette agence, n’ont fait l’objet d’aucun débat au parlement, ce dernier étant dissous depuis le 1er mars 2020.

QUELLES POSSIBILITÉS POUR LA KABYLIE ?

La junte militaire arabo-islamiste arrogante et menaçante envers les populations de ce « pays » et des États voisins, avec sa pseudo puissance militaire mais lestée par sa précarité économique, raillée, incapable d’assurer son minimum vital, son autosuffisance alimentaire, elle-même État dans ce pseudo-État dit algérien, avec des lois qu’elle a érigées contre les populations de ce territoire dit « pays », va-t-elle s’exécuter et répondre aux recommandations, plutôt des exigences, du HCDH, elle qui se targue d’être une puissance régionale souveraine, en réalité une entité aux pieds d’argile ?En 2018 déjà l’agence onusienne avait relevé le caractère imprécis de cette définition et avait recommandé en vain la révision de cet article pour « l’adapter aux bonnes pratiques du droit international ».

Au regard des multiples condamnations, dénonciation et résolutions précédentes, outrageusement ignorées pour certaines ou lâchement biaisées par une victimisation et des pleurnicheries portant sur une factice ingérence des occidentaux dans ses affaires intérieures, la ritournelle « main de l’étranger » pour exciter et remobiliser le patriotisme érodé des algériens, et surtout sans aucune conséquence et suite, la junte va probablement persister impunément dans sa violation et des lois dites algériennes et du droit international. La mise en demeure d’un parti dit d’opposition, sommé de cesser « ses activités politiques » une semaine après la publication du rapport du HCDH donne la mesure du déni que la junte oppose à toute recommandation. La junte va-t-elle ajouter SA définition à ce qu’elle entend par « activité politique » à cette ordonnance outre que celle universellement connue ?Au demeurant pourquoi ce qui est toléré pour le dictateur égyptien, El Sissi, avec ses plus de 10 000 prisonniers politiques, malgré les nombreuses condamnations onusiennes et parlementaires européennes, serait-il dénié à la junte algérienne, d’autant plus que l’écrasante majorité des détenus politique et d’opinion sont des Kabyles – toutes opinions politiques confondues – et que le reste des algériens qui composent la majorité démographique, acquise à l’idéologie arabo-islamiste avec ses pendants socio-théocratiques et dont la problématique politique se limite à de simples revendications alimentaires ou à la simplification des démarches administratives.

Dans ce cas d’espèce, que va faire l’ONU, le rapport de son agence sur les droits de l’homme ignoré et face à certains eurodéputés qui ont déjà par le passé demandé des sanctions contre la junte ?Assise sur un baril de pétrole et d’immenses richesses minières qu’elle est prête à échanger contre son maintien au pouvoir, la junte militaire arabo-islamiste a démontré par le passé qu’elle sait faire fi des rapports et des résolutions de l’ONU.

ASSISTANAT POLITIQUE.

Les cas des régimes égyptien, syrien, iranien…algérien maintenus dans des équilibres politiques et économiques fragiles et très précaires etc… avec toujours la même politique d’écrasement des populations de leur territoire, maintenues dans la pauvreté multidimensionnelle sociale et économique systémique, montre les limites des recommandations des instances de l’ONU.

La Kabylie occupée, maintenue sous la férule dictatoriale coloniale algérienne, ne peut hypothéquer ainsi l’avenir culturel et civilisationnel des générations futures, les retards actuels et ce dans tous les domaines, sont déjà immenses. Les Kabyles égarés vont-ils accepter encore la colonisation algérienne et continuer de vivre ainsi dans le déni identitaire, linguistique et libertaire ainsi que dans le bricolage politique, économique et dans l’archaïsme sociétal et civilisationnel arabo-islamiste, le quotidien rythmé par les éternels arbitraires judiciaires et les sempiternelles pénuries multiples ?La Kabylie est amenée à ne pas tomber dans le piège de l’assistanat politique. Aussi stériles que puissent paraître les multiples actions des commissions de défense des droits de l’homme restées vaines, l’aspect positifs des condamnations et des résolutions des instances des droits de l’homme de l’ONU est qu’il permet aux Kabyles de prendre à témoins la communauté et l’opinion internationales, leviers politiques immenses à même de consolider et d’affirmer la revendication déjà formulée de son droit à l’autodétermination. Un droit inaliénable.

CLKI – Chroniqueurs Libres de la Kabylie Indépendante

SIWEL 10000901 JAN 22