CONTRIBUTION, PAR AREZKI BAKIR (SIWEL) — Le militant kabyliste Arezki Bakir, ancien président du Haut conseil à la diaspora kabyle, (HCDK), instance du Gouvernement provisoire kabyle en exil (Anavad) brosse dans sa contribution l’étendue hétéroclite des ennemis du peuple kabyle allant du régime algérien jusqu’à ses « opossants », en passant par les conspirationnistes de gauche et antisionistes d’extrême-droite, réunis par la « fachosphère » allant des arabo-islamistes : Houria Bouteldja des « indigènes de la République », Saïd Branine de « oumma.com » et Salim Laibi le « libre penseur » (sic), jusqu’au quenelliste, Dieudonné et à l’ancien dragueur libertaire, Alain Soral fondateur d’« égalité et réconciliation » :

 

D’abord les médias algériens, ensuite les « opposants » algériens, suivis des sites conspirationnistes et antisionistes d’extrême-droite et, enfin, les officiels du régime algérien lui-même… les indépendantistes kabyles essuient des rafales de tous côtés.

Qualifié de « groupuscule » par la plupart de ses adversaires et détracteurs, on en vient à se demander ce que ce serait si le mouvement indépendantiste de Kabylie était considéré par cette meute aux abois comme un mouvement de masse !

De cette meute, je ne souhaite pas évoquer les médias, le régime et son opposition algérienne. Les sites proches des indépendantistes kabyles en parlent suffisamment et les citoyens ne sont pas dupes.

Il est par contre intéressant de se pencher sur le milieu conspirationniste et « antisioniste » d’extrême droite en France. Une frange de ce milieu se fait d’ailleurs volontiers le relais du régime algérien dans l’hexagone. J’ignore si les liens entre certains membres de cette « fachosphère » et le régime est réel. Mais si tel n’est pas le cas, l’alliance est objective.

Les indigènes de la République, emmenés par la diva médiatique Houria Bouteldja, en sont un exemple flagrant. Titubants dans une contradiction flagrante, entre une allégeance assumée à « l’Algérie et à l’islam » (dixit Bouteldja) et une « douloureuse » présence dans l’hexagone que personne ne les oblige à prolonger (grand écart « olympique »), les indigènes, adossés à l’arabo-islamisme, balaient d’un revers de main toute cause entrant en conflit avec leurs allégeances.

Ainsi, les kabyles, peuple qui s’est forgé à travers les siècles, dans la résistance aux différents oppresseurs, et en s’appuyant sur une culture et des traditions millénaires, seraient une « invention du colon français pour diviser les algériens ». Là aussi, la contradiction ne leur fait pas peur. Peu importe que l’Algérie et ses frontières aient été tracées par la France et que la Kabylie, après d’âpres combats contre le colonisateur français, se soit retrouvée enclavée « de fait » dans ce territoire, héritage post colonial. Pour ces falsificateurs de l’Histoire, c’est la Kabylie qui est une création coloniale et non l’Algérie…

Les incohérences idéologiques et l’ignorance historique crasse des dirigeants de ce mouvement ne les empêchent pourtant nullement d’avoir accès aux médias hexagonaux.

Les plus naïfs diront que la France, masochiste, adore donner la parole à ceux qui la combattent. D’autres, plus subtils, vous diront que les médias français sont conscients de laisser s’exprimer une organisation dont le discours est tellement ridicule qu’il en est, au final, totalement inoffensif. Du moins croient-ils…

La logique voudrait que ces « indigènes », qui n’aiment pas la France et ce qu’elle représente, aillent s’établir dans leur véritable patrie. Mais ce serait trop facile. Mais le bon sens et les indigènes de la République s’évitent obstinément. Ils restent donc en France, y insultent ses habitants, y pleurnichent dans les médias et fantasment un pays d’origine en qui ils voient toutes les vertus. Sans omettre d’insulter, comme il se doit, le peuple kabyle, peuple frondeur et résistant, qui lui ne se trompe pas de cible… Ce valeureux peuple kabyle, qu’on veut absolument dépersonnaliser par l’arabisation et l’islam…

L’islam… Dont le relais en France et dans la « fachosphère » est le site électronique « oumma.com ». Le patron de ce site, Saïd Branine, a fait de l’arabo-islamisme le curseur permettant de déterminer où est le bien et où est le mal. Le monde arabo-musulman s’étend du proche orient jusqu’au Maroc. Dans toute cette étendue, les peuples colonisés, assimilés ou résistants à cette assimilation, sont sommés d’accepter cette transformation identitaire ou, au mieux, de souffrir en silence.

Saïd Branine et ses amis sont eux-mêmes arabo-musulmans ou ayant acceptés l’assimilation, ils ne comprennent donc pas les « résistances ». Dans leur esprit, c’est la nature des choses. Il faut accepter l’allégeance à l’arabo-islamisme et accepter l’autorité de ses dirigeants. Qui savent où est le bien et où est le mal. Surtout le mal d’ailleurs. Et par là il y a les fameux juifs et « Israël », l’incarnation du mal aux yeux de ces fous d’Allah. La Kabylie est souvent comparée à Israël. Les kabyles ont souvent été considérés comme des « juifs » en Algérie. En effet, comme Israël, la Kabylie est enclavée dans une zone arabo-musulmane pour le moins hostile, ou la diversité n’est que modérément appréciée…

En tout état de cause, le site « oumma.com » a décidé de combattre les indépendantistes kabyles, d’abord en minimisant leur influence, ensuite en les intégrant au « sionisme ». Le refus de s’assimiler à l’arabo-islamisme est tout simplement, pour les « oummistes », une allégeance au « sionisme ». L’idée d’une réflexion et d’un cheminement ayant conduit des citoyens à refuser cette assimilation pour des raisons historiques et de fidélité à leur identité réelle est donc pour eux totalement inimaginable. Un individu récalcitrant à l’assimilation arabo-musulmane est donc forcément manipulé… Et puis c’est tellement commode et pratique de le croire et le faire croire !

Nous ne pouvons pas voyager dans la « fachosphère » sans évoquer l’ancien dragueur libertaire, ancien communiste, ancien du front national et qui règne, avec son « ami » Dieudonné, dans ce milieu : Alain Soral, fondateur du journal électronique « égalité et réconciliation ».

Son « antisionisme » impénitent l’a amené à « draguer » les arabo-musulmans de l’hexagone, dans une entreprise d’importation en France du conflit israélo-palestinien. Le réalisateur de « confession d’un dragueur » s’est mis en tête de faire des rejetons de l’immigration maghrébine des « français de confession musulmane ». Des « patriotes musulmans ». Le terme « musulman » est ici important à plus d’un titre.

D’abord, Soral a choisi d’essentialiser les français d’origine maghrébine en les étiquetant « musulmans ». Il a donc décidé d’interdire à cette population de choisir ou non d’adhérer à une religion. Pour eux, ce sera l’islam et point barre. Tous ceux qui choisiront une autre religion, ou pire, de ne pas croire du tout, auront été victimes du « sionisme ». Des renégats ou des traîtres qu’il faudra combattre. Définir une partie de la population par une religion, dans un pays dont la séparation du politique et du religieux et dont la non reconnaissance des communautés sont partie intégrante de l’identité est le choix qu’a fait cet ancien pourfendeur du… communautarisme !

Comme quoi, les temps changent. Mais les contradictions ne font pas peur à Alain Soral.

Vouloir faire d’une partie des citoyens de France des « patriotes » via une religion, l’islam, qui ne reconnait pas la distinction entre spirituel et temporel, c’est la voie qu’a choisi l’essayiste « antisioniste » pour arriver à ses fins…

Soral, ancien communiste, n’a pas non plus oublié de convertir son leadership dans le milieu en espèces sonnantes et trébuchantes. Vendre des livres, dont certains font l’apologie de l’antisémitisme, sur internet et faire payer ses vidéos de propagande sont le moyen qu’il a trouvé pour « financer son combat »… contre la mondialisation marchande. Vous voulez combattre la mondialisation marchande avec Soral ? Et bien il faut mettre la main à la poche, cela se mérite ! Un nouveau concept : la révolution payante !

Dans certaines de ses vidéos, on retrouve des prises de position contre les indépendantistes kabyles. Ce qui permet de caresser dans le sens du poil les « arabo-musulmans », qui constituent une part non négligeable de sa « clientèle »… Pas fou le Soral, !

Pour finir, me vient à l’esprit celui qui se définit comme « libre penseur ». Défenseur farouche de l’arabo-islamisme, « antisioniste » acharné, je concède à Salim Laïbi d’avoir inventé un nouveau concept : celui de « la libre pensée orientée vers la défense d’une idéologie ». C’est que Salim Laïbi est un libre penseur dont la libre pensée doit servir ses convictions. A savoir la défense de l’idéologie « arabo-musulmane » et « antisioniste ». Une « libre pensée » bien cadrée donc. Peut-on être « libre-penseur » et se référer de manière dogmatique aux préceptes du Coran ? Les scientifiques vous répondront par la négative. Mais Salim Laibi a réussi à concilier tout cela. Il pense « librement » mais sans jamais aller en contradiction avec le Coran et l’antisionisme.

Salim Laibi est un kabyle qui a fait allégeance à l’arabo-islamisme. Définitivement. La percée des indépendantistes kabyles, pas vraiment « antisionistes », ni adeptes de la Charia, est une mauvaise nouvelle pour lui. Ses copains arabo-musulmans savent qu’il est d’origine kabyle. Il faut donc les rassurer en qualifiant les indépendantistes kabyles de « groupuscule ». Nier toute spécificité kabyle. Les dizaines de milliers de personnes qui ont manifesté en Kabylie sous la bannière du mouvement indépendantiste, il ne faut surtout pas en parler. Ou alors les prendre pour des imbéciles en disant qu’ils sont manipulés. Par qui ? Dois-je vraiment vous le dire ?

Le ras le bol des kabyles est bien présent oui. Mais ce ras-le-bol est maîtrisé et accompagné d’un cheminement intellectuel qui a conduit beaucoup de citoyens kabyles à désormais envisager la création d’un état indépendant du régime algérien, de ses turpitudes et de sa politique d’assimilation.

La Kabylie et la liberté sont faites pour se rencontrer. Le régime algérien et les organisations proches de l’arabo-islamisme le savent et font écran entre ces deux entités. Mais la distance qui sépare la Kabylie de la liberté n’est pas si lointaine. C’est juste les obstacles qui sont féroces.

Arezki BAKIR.

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